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Message  Bobabs Lun 20 Fév - 10:08

Le 6 juin 1944, parmi les troupes alliées qui débarquèrent en Normandie, se trouvaient quelques Français. Soixante ans après, un des acteurs de cette journée se souvient…

Léon GautierTEMOIGNAGES Longauthier1yb


PROFIL
Léon Gautier

Après sa démobilisation, Léon Gautier travaille en France dans une entreprise de carrosserie puis au Cameroun et au Biafra pour le Comptoir français d'Afrique occidentale pendant sept ans. Après avoir repris ses études, il achève sa carrière professionnelle dans l'Oise dans l'expertise automobile. Âgé de 81 ans, il vit aujourd'hui à Ouistreham (Calvados), non loin de l'endroit où il a débarqué le 6 juin 1944. Il est membre du conseil d'administration du musée du Numéro 4 Commando, président de l'Association des Commandos français et participe à différentes interventions auprès des élèves.

TDC : En 1940, vous êtes apprenti canonnier dans la marine. Pourquoi cet engagement alors que vous n’êtes âgé que de 17 ans ?
Léon Gautier. Je me suis engagé en février 1940. J’étais jeune, c’est vrai, mais il faut se rappeler le contexte de l’époque. Nous étions nourris par une pensée patriotique en souvenir de la guerre de 1914-1918. Toute notre jeunesse, nous avons été élevés dans le souvenir des morts de la Grande Guerre ; dans les familles, les discussions tournaient souvent autour des « Boches ». Nous apprenions La Marseillaise dans les écoles dès l’âge de 6 ans. Aussi, lorsque la guerre a éclaté, beaucoup de mes camarades se sont-ils engagés. J’ai choisi la marine, la seule arme qui pouvait m’accepter malgré mon âge.

TDC : Donc, en juin 1940, vous allez en Angleterre…
L. G. À bord du Courbet, nous avions pour mission de défendre Cherbourg et de tirer sur les convois allemands. Puis, le 20 juin, nous rejoignons l’Angleterre. Là-bas, des officiers nous demandent si nous voulons nous engager dans l’armée britannique pour continuer la guerre. Nous n’étions pas très emballés ! Quelque temps après, chez de jeunes Anglais, nous apprenons par la radio l’existence d’une troupe française commandée par le général de Gaulle. C’était la première fois que j’entendais parler de lui. Nous sommes donc partis avec deux camarades à Londres le 13 juillet 1940. Dès le lendemain, nous avions une inspection par le général de Gaulle et l’amiral Muselier. J’ai embarqué ensuite comme canonnier sur Le Gallois, un navire de commerce, et nous sommes partis dans l’Atlantique en convoi pour le transport de minerai. Au retour, nous avons été attaqués par des u-boat. Des bateaux ont été coulés et des marins se sont noyés. J’en ai fait des cauchemars longtemps après la guerre. Après cette expédition, nous sommes rentrés en Angleterre. J’ai été envoyé comme fusilier marin au Liban jusqu’en 1943. Puis, je me suis porté volontaire pour les commandos du commandant Kieffer.

TDC : Au sein de ce commando, vous aviez reçu une formation pour vous préparer au débarquement ?
L. G. Nous avons été formés pendant plusieurs semaines dans un camp spécial en Écosse, à Achnacarry. Discipline de fer et entraînement très difficile. Les instructeurs britanniques nous menaient la vie dure. On escaladait des falaises, on s’entraînait au close-combat, les exercices se faisaient à balles réelles, on apprenait à
lire les cartes, on nous larguait quelque part et il fallait se débrouiller pour retrouver sa route. On devait faire les 7 miles (11 km 200) en moins d’une heure, et pas en tenue de sport, avec un sac sur le dos et l’armement ! Quand vous sortiez de là, vous étiez devenu un combattant d’élite.

TDC : Arrive le moment du débarquement. Comment se passent les préparatifs ?
L. G. On nous rassemble dans un camp secret et on nous informe des plans du débarquement une semaine avant. Les plages avaient des noms de code comme Juno ou Sword. Mais nous avons su rapidement où l’on allait car, parmi nous, les Havrais avaient identifié la région de Ouistreham sur les cartes. Les officiers britanniques nous ont donné l’ordre de garder le secret. Le débarquement était prévu le 5 juin, mais le temps était trop mauvais. Nous nous sommes alors regroupés dans deux barges de 90 hommes autour de l’île de Wight, et, vers 22 h 30, nous avons pris la mer. Beaucoup ont souffert du mal de mer. Je me souviens que l’on nous a servi une soupe, c’était, paraît-il, une soupe de tortue ; je n’ai pas trouvé cela très bon…

TDC : Le 6 juin, vous aviez le sentiment de vivre une journée historique ?
L. G. En voyant les côtes de France, nous avons eu un petit pincement au cœur. Il y avait de la joie et de l’appréhension. Mais nous nous sentions très forts. Il faut dire que nous faisions partie d’une armada qui semblait invincible. Aucun d’entre nous n’aurait voulu laisser sa place. On se doutait un peu que notre débarquement allait compter pour la suite de la guerre, mais ce qui importait, c’était ce que nous allions faire sur le moment. Au matin, le débarquement se déroule avec de la casse. Alors que nous étions encore au large, les canons nous tirent dessus. On arrive à Colleville. En face ils ne sont pas surpris, malgré la brume et les fumigènes. Nous avions pour mission de prendre la route de Lion et le casino, un blockhaus en fait. Le casino tombe grâce au soutien d’un char trouvé par le commandant Kieffer. La troupe 8, dont je faisais partie, devait neutraliser les défenses de la côte. Même si nous étions abrités par les dunes, nous avons subi des pertes : le premier jour 10 tués et 36 blessés évacués sur 177 hommes, ce qui fait 25 % des effectifs hors de combat !

TDC : Vous vous attendiez à plus de pertes ?
L. G. Kieffer nous avait dit avant le départ dans cette aventure : « Il n’y a peut-être pas dix d’entre vous qui reviendront. Celui qui ne veut pas y aller peut très bien ne pas débarquer, je ne lui en voudrai pas. » Nous sommes tous restés, l’envie de rentrer chez nous était plus forte que la peur.

TDC : Comment se termine cette journée ?
L. G. Les combats à Ouistreham s’achèvent vers 11 h 30. Alors que nous retournons récupérer nos sacs laissés dans une colonie de vacances, des avions nous mitraillent. Puis, vers 17 heures, nous rejoignons le secteur de Pegasus Bridge pour garder la tête de pont sur l’Orne. Nous devons y faire face à des contre-attaques violentes. Les combats continuent ensuite dans l’Eure. Fin août, les Allemands passent la Seine et nous sommes rapatriés sur l’Angleterre. Pour ma part, la guerre se termine là car je me casse une cheville, mais mes camarades se battent encore durement en Hollande.

TDC : De quelle manière se passe l’après-guerre pour vous ?
L. G. Je suis rentré en France, gare du Nord. Nous étions sans un sou avec ma femme. Il a fallu que je me débrouille parce que le gouvernement de l’époque nous a laissé tomber. On avait l’impression de ne pas exister. Des marins qui étaient restés planqués pendant la guerre nous jalousaient car nous avions le droit de porter la croix de Lorraine ; ils avaient peur que nous prenions leur place sans doute. Du coup, j’ai quitté l’armée pour trouver du travail dans le civil.

TDC : Alors que l’on se prépare à fêter le soixantième anniversaire du Débarquement, vous avez l’impression d’être enfin reconnu ?
L. G. Nous avons toujours été bien accueillis par la population normande. Au niveau de l’État, c’est seulement depuis les années 1980 que l’on s’intéresse à nous. Malgré cela, mes camarades ont réussi à s’en sortir et à vivre honnêtement. Aujourd’hui, nous nous réunissons souvent entre vétérans, nous sommes restés très solidaires. Par ailleurs, je fais visiter le musée du Numéro 4 Commando à des élèves pour perpétuer la mémoire de ceux qui sont tombés pour libérer leur pays.


Dernière édition par le Lun 13 Mar - 23:01, édité 2 fois
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TEMOIGNAGES Empty LE RECIT D'ALEXANDRE RENAUD (Maire de Ste Mère Eglise)

Message  Bobabs Lun 20 Fév - 10:09

LE RECIT D'ALEXANDRE RENAUD (Maire de Ste Mère Eglise le 6 juin 1944)


... "Nous venions de nous étendre sur nos lits et commencions à sommeiller quand de violents coups heurtèrent la porte de la maison. Je me levai. On venait m'avertir que le feu dévorait une villa, de l'autre côté de la place, à l'entrée du parc de la Haule. Les pompiers essayaient en vain de maitriser l'incendie. On fit la chaîne jusqu'à la pompe du marché à veaux. Les hommes couraient, leurs seaux de toile à la main, et en jetaient le contenu dans un grand baquet.

Au travers des bosquets, on apercevait de grandes ombres qui s'affairaient. Le vent courbait les flammes et des parcelles de papier et de foin embrasées tourbillonnaient vers une grange située vingt mètres plus loin et garnie de paille et de bois. Dans les airs, les gros bombardiers passaient en vagues lourdes d'ouest en est. Les mitrailleuses croisaient leur feu au dessus de nous, et des centaines de grosses mouches lumineuses sifflaient, miaulaient et chuintaient, claquant parfois sur les murs de la maison en flammes.

Les Flak, en tenue de combat, l'arme chargée, nous regardait. Les éclatements de grosses bombes, au loin, ébranlaient la terre. Soudain, le tocsin sonna, triste, lugubre, à coups précipités. Le malheur était sur Sainte Mère Eglise et la cloche appelait à l'aide. A ce moment précis, de gros avions de transport, tous feux allumés passèrent en ras - motte au dessus des arbres, d'autres suivirent immédiatement, puis d'autres encore... ils arrivaient de l'ouest en longues vagues, presque silencieux, et leurs grandes ombres se projetaient sur la terre.

Soudain, de gros confetti sortirent de leurs carlingues et descendirent rapidement vers la terre. Des parachutistes ! ... Le travail de pompe s'interrompit, toutes les têtes se levèrent, les Flak ouvrirent le feu. Tout autour de nous, les parachutes s'abattaient lourdement sur le sol. Aux lueurs de l'incendie, nous apercevions distinctement l'homme, qui au bout de ses câbles, manoeuvrait son parachute. L'un d'eux, moins habile peut être, vint s'écraser au milieu des flammes. Des étincelles jaillirent et le feu devint plus ardent. Un autre atteint par les balles eut une violente contraction des jambes ; ses bras levés s'abaissèrent. Le grand parachute gonflé par le vent violent, roula longtemps sur la prairie l'homme qui ne résistait pas : c'était un mort...

Dans un vieil arbre tout couvert de lierre, un grand voile blanc pendait, et à son extrémité, nous vîmes remuer un homme. Agrippé aux branches, doucement, comme un reptile, il descendait. Puis il essaya de détacher sa ceinture, les Flak l'aperçurent. A quelques mètres, les mitrailleuses firent entendre leur crépitement sinistre ; les mains du malheureux retombèrent, le corps oscilla et pendit mollement au bout de ses câbles. Devant nous, à quelques centaines de mètres de la scierie, un gros avion de transport s'écrasa au sol, et bientôt un deuxième incendie fit rage. Le tocsin lançait toujours son appel d'alarme. Nous étions maintenant en pleine zone de tir de la mitrailleuse du clocher et les balles claquaient sur le sol, non loin de nous.

La nuit était douce, et la lune la déchirait en larges bandes de lumière. Pendant ce temps, à la pompe, un parachutiste surgit brusquement de l'ombre, au milieu des nôtres. Il braqua sur nous sa mitraillette, mais se rendant compte que nous étions des Français, il ne tira pas. Une sentinelle allemande cachée derrière un arbre poussa un grand cri et s'enfuit à toutes jambes. Le parachutiste essaya de poser quelques questions, mais personne dans ce groupe ne parlant Anglais, il traversa la route et se perdit dans la nuit. Au-dessus de l'incendie, sans arrêt, les grands avions glissaient et jetaient leurs cargaisons humaines de l'autre côté du cimetière. Bientôt les Flak, réalisant l'importance de l'évènement, nous donnèrent l'ordre de rentrer au plus vite. Sur la place, un soldat allemand nous croisa : - Parachutistes "Tommies', tous kaput !!!.. nous dit-il. Et il tint à nous montrer le corps d'un homme étendu près de son parachute"...

Alexandre Renaud
Sainte Mère Eglise, première tête de pont Américaine
Editions O. Pathé, 2ème trimestre 1955.


Dernière édition par le Ven 31 Mar - 9:26, édité 1 fois
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TEMOIGNAGES Empty Témoignage du Gi Bernard DARGOLS

Message  Bobabs Lun 20 Fév - 10:12

TEMOIGNAGES Bernarddargolsgi9ze.th


Témoignage du Gi Bernard DARGOLS

Bernard DARGOLS, 23 ans engagé comme Gi et débarqué à Omaha Beach le 8 juin 1944. Aujourd'hui, âgé de 83 ans et résidant en France, il revient chaque année à St Laurent/ Mer pour se recueillir et rencontrer les habitants; il a accepté de nous livrer, en exclusivité, son témoignage, en espérant que "nous en ferons bon usage en faveur des élèves et de la paix".

PREFACE

En stage aux Etats-Unis depuis deux ans et, puisque né à Paris, j'ai été convoqué avec huit autres Français au Consulat de France de New York sur la 5ème avenue. Il s'agissait d'y passer le conseil de révision.

En juin 1940, j'avais 20 ans. Après son examen, le médecin m'a déclaré "bon pour le service". Un officiel m'a alors assuré que, bientôt, je serai rapatrié pour rejoindre l'armée du maréchal Pétain, me précisant « Et attendez nos ordres ».

La France et les Etats-Unis avaient encore des relations diplomatiques. Par l'ambassadeur Leahy, nous avions une connaissance assez précise de ce qui se passait déjà en France. L'effondrement de l'armée française en juin 1940 avait causé la stupeur aux Etats-Unis. L'entente Pétain - Hitler, les collaborateurs, la milice, des lois honteuses etc. s'avéraient plus que suffisants pour penser un seul instant revenir en France me mettre au service d'une idéologie exécrable.

Quelques jours plus tard, toujours à New York, j'ai contacté le colonel De Manziarly, sympathique représentant de De Gaulle. Après un entretien chaleureux dans son bureau, il m'a affirmé - si j'acceptais - qu'il me ferait acheminer à Londres, sans délai, pour être officier dans les Forces Françaises Libres.

Le général De Gaulle, peu connu alors, passait pour avoir du caractère. Ses contacts avec le président Roosevelt et le premier ministre Churchill étaient plutôt tendus. L'image de la France se dégradait par divers incidents. A New York, nous assistions à l'accostage, pour quelques jours, de navires français en vue de se ravitailler. L'équipage, une fois à terre, offrait un spectacle désolant : les marins, en général gaullistes, se battant contre les officiers, plutôt pro-Vichy.

Ces événements et d'autres m'ont détourné du choix que j'envisageais : partir pour Londres.

La dernière option qui s'offrait restait un engagement dans l'armée américaine. Tous mes jeunes amis américains réussirent, sans grande peine, à me convaincre que je serais plus utile, pour combattre l'ennemi, sous la bannière étoilée que sous le drapeau tricolore orné de la Croix de Lorraine.

De ce fait, en avril 1943, un camion militaire a transporté le soldat Dargols vers une cour de justice, à Spartanburg en Caroline du Sud, où, en quelques minutes, on m'a déclaré citoyen Américain. J'aurai pu comme on me le proposait, américaniser mon patronyme. J'imaginais, en pensant aux blagues, la surprise de ma famille et mes amis, à mon retour en France, s'ils apprenaient que je m'appelais dorénavant, Bernard Roosevelt. Finalement j'ai conservé mon nom.

Depuis mon arrivée aux Etats-Unis en 1938, et durant ma participation avec la 2eme division d'infanterie US, jusqu'à ce jour, j'ai été l'objet de tant de gentillesse, de sympathie, j'ai partagé leur sens de l'humour, et, j'avoue n'avoir jamais regretté ma décision.

Ces pages suivantes, je l'espère, donnent un bref aperçu des mois qui m'ont profondément marqués.

Elles sont dédiées à Françoise que j'avais rencontrée à New York et où, après ma démobilisation nous nous sommes mariés.
Par ses lettres régulières, elle a été d'un soutien moral constant.

Ma semaine du 6 juin 1944...avant et après.
Souvenirs d'un Gi.

« L'unique moyen de rendre la vie à ce pays est de lui rendre la liberté » Jean Guéhenno Journal des années noires 1940-1944

II y a quelques années de cela, j'ai entendu à la radio un universitaire français affirmer que les camps d'extermination et les chambres à gaz n'avaient jamais existes. Cet homme se servait de sa notoriété, mais aussi de sa crédibilité en tant qu'historien et spécialiste, pour nier la réalité. Jusqu'à ce que j'entende les paroles de ce négationniste, il ne m'avait jamais semblé utile de raconter ce que j'avais vécu, difficulté de remuer de tels souvenirs ? Peur de ne pas être compris ?. Mais ce jour là, devant tant de mauvaise foi, il m'est apparu que témoigner devenait une obligation. Si nous ne faisions pas ce devoir de mémoire, nous laissions, de notre vivant, la place à ceux qui revisitent l'histoire à leur manière.

Lorsque aucun vétéran ne sera plus de ce monde, ne verra-t-on pas fleurir des livres certifiant "preuves" à l'appui que le débarquement allié de juin 44 en Normandie n'a jamais existé ? Ne nous fera-t-on pas croire que c'est une super production hollywoodienne ? N'irons-nous pas jusqu'à lire que les nazis n'ont jamais été battus mais qu'ils se sont retirés dans leur pays après avoir accompli leur mission ?

De cette période, j'ai gardé beaucoup de notes et de photos qui ajoutées à des souvenirs très vivaces m'aident aujourd'hui[octobre 2004]à écrire ces quelques lignes, car c'est en tant que Gi que j'ai participé à l'opération Overlord.

Le "basic training" - l'entraînement de base - avait pour but d'intégrer en 12 semaines, un civil dans sa vie militaire.

C'est au Camp Croft, Caroline du Sud, que j'ai effectué le mien. Il avait cette réputation d'une discipline très sévère : gymnastique poussée, quotidienne, longues marches de nuit, courses d'obstacles, manœuvres dans le Tennessee, ramper sous un réseau horizontal de fils barbelés, pendant qu'une mitrailleuse tirait à balles réelles juste au-dessus du dos. Embrocher l'ennemi, personnifié par des sacs de sable, avec la baïonnette fixée au bout de son fusil, demande une certaine technique. L'exercice paraît simple jusqu'au moment où l'instructeur vous rappelle que cette baïonnette reste parfois plantée dans le corps, bloquée par des os et des muscles. Il est difficile de la désengager rapidement. La procédure consiste alors de prendre appui sur la jambe arrière, de repousser avec force le buste du soldat blessé à l'aide de l'autre jambe, et, simultanément, retirer la baïonnette le plus vite.

On ne peut vraiment s'imaginer comment, trois mois de "basic training" suffisent pour transformer un civil paisible et non-violent en un soldat dur et impitoyable.

L'entraînement en vue du débarquement avait commencé aux Etats-Unis en novembre 1943 et se poursuivait en ce début juin 44 dans un camp retiré et bien camouflé, au Pays de Galles. Je faisais partie du M.I.S. - Military Intelligence Service - remplacer "Intelligence" par "Informations" me semblait plus approprié le plus souvent.

Notre team de spécialistes était composé de six hommes, deux officiers et quatre sous-officiers. Tous parlaient plus ou moins bien français et certains avaient des notions d'allemand. Notre équipement était constitué de deux jeeps, boussoles, cartes et montres...Chacun avait un casque, une mitraillette "your best friend" - votre meilleur ami - et un pistolet. Un masque à gaz encombrant complétait cet attirail.

Une anecdote à propos de l'attribution des chaussures me fait toujours sourire soixante et un ans plus tard. Nous étions à Fort Dix, dans l'Etat du New Jersey. Nous venions d'être incorporés dans l'armée américaine et je nous revois habillés en civil pour quelques instants encore, en file indienne et en chaussettes, monter chacun notre tour sur un plateau balance posé sur le sol. On nous demandait de soulever deux seaux remplis de sable, un au bout de chaque bras. Sous le poids nos pieds prenaient leur forme maximum en longueur comme en largeur. Le militaire préposé criait alors un chiffre, la longueur, et une lettre, la largeur, qui pouvait se décliner jusqu'à 4 tailles différentes. Pour moi, ce fut 9,5E. Jamais mes pieds ne s'étaient trouvés aussi à l'aise.

Aujourd'hui, on ne trouve toujours pas en France en dehors de la chaussure de luxe, de magasins où l'on prenne en compte la largeur de votre pied !

Nous étions en pleine forme. Les moindres détails avaient été vérifiés. Une rampe avait même été installée afin que nous puissions nous exercer à la descendre en accélérant fortement pour éviter que les jeeps ne s'enlisent dans le sable de la plage. Leurs phares avaient été entourés d'un mastic imperméable.

Ma crainte, ma hantise était d'être, sans avertissement, expédié vers le théâtre des Opérations du Pacifique, où sévissaient les Japonais, ennemi de longue date des Etats-Unis.

Dans le cadre de notre préparation minutieuse du débarquement, j'avais reçu l'ordre de réunir les hommes de la division, 13 000, par groupes de 500 environ pour leur parler de la France et répondre au mieux à leurs questions. Assis devant moi dans un champ, je m'efforçais de leur faire connaître ce que pouvaient être les Français de 1944 : leurs multiples difficultés, les problèmes de nourriture, de vêtements, de transport, etc...J'insistais qu'il fallait considérer les Français, non pas comme des ennemis, mais comme des alliés, malgré ce que nous savions déjà des collaborateurs. Ils voulaient connaître le lieu du débarquement, la distance entre la côte et Paris, ils voulaient savoir si le lait était homogénéisé, si la population leur était favorable et, bien sûr si les filles étaient jolies...

Que la France soit plus petite que le Texas les étonnait beaucoup et les 200 miles annoncés entre la côte et Paris les faisaient rêver ! Ils se voyaient déjà à la Tour Eiffel !

Au cours des manœuvres, je jouais souvent le rôle du civil français. Mes camarades m'interrogeaient, en français, pour essayer d'obtenir des renseignements sur l'ennemi.

La mission pour laquelle l'armée nous avait formés dans le Maryland pouvait se résumer, en bref, dans l'interrogation des civils les plus proches de la ligne du front ou, mieux, au-delà. Le but étant de recueillir des informations d'ordre tactique quant à l'ennemi qui nous faisait immédiatement face, c'est-à-dire leur position exacte, le nom de leur unité, leur nombre, leur type d'équipement, l'emplacement de mines et des dépôts de munitions, etc...

A nous d'interpréter et de vérifier rapidement l'exactitude des renseignements obtenus. Suivant leur importance nous les transmettions sans délai au colonel Christensen, notre G-2, 2ème bureau, de la 2eme division d'infanterie. Aucune attaque ou contre-attaque, aussi insignifiante soit-elle, ne peut être entreprise sans avoir le plus de renseignements militaires possible sur l'ennemi proche.

Fin mai 1944, le débarquement était devenu une plaisanterie entre nous, car des rumeurs couraient jour après jour que D-Day était pour le lendemain.

Mais nous étions toujours là. La nourriture commença à s'améliorer. Pour nous c'était le signe évident que le débarquement allait enfin devenir une réalité. Il nous fallait être au mieux de notre forme pour affronter l'épreuve.

Enfin, les détails préparés, appris et répétés nous rassuraient : nous nous sentions prêts moralement et physiquement.

C'est à Cardiff le 5 juin 1944 que notre équipe a finalement embarquée, ou s'est plutôt entassée, dans un Liberty ship, bateau aménagé pour le transport de troupes. Nous avons alors connu toutes les nuances de la peur. Mais nous étions ensemble... et calmes. Pas la mer.

L'appareillage, retardé par un mauvais temps inhabituel nous a vraiment paru interminable. Puis lentement, le bateau a pris le départ pour contourner le Pays de Galles, puis s'arrêter, puis repartir, toujours ballotté, et longer le sud de l'Angleterre. Presque tous les Gi's ont souffert du mal de mer. Nous étions secoués, fatigués par ces trois jours en mer. Nous n'avions qu'une hâte, celle de quitter ce Liberty ship. J'avoue avoir souhaité par moments être le pilote de notre bateau pour pouvoir, comme avec nos jeeps, exécuter une rapide marche arrière.

Au fur et à mesure que nous approchions des côtes françaises, notre bateau était rejoint d'abord par des dizaines puis par des centaines d'autres embarcations de toutes sortes, petits bateaux, gros bâtiments de guerre et transports de troupes.

Bien au dessus de certains navires, flottaient, presque immobiles, les "sausage-balloon-barrage", ces ballons en forme de gros cigares d'où pendait à la verticale un câble métallique. Ces filins dissuadaient l'approche de l'aviation ennemie et ajoutaient un aspect étrange à cette armada. A notre étonnement et soulagement, très peu d'avions allemands ont approché nos convois au cours de cette croisière inquiétante.

Dans la soirée du 8 juin,la côte apparaît enfin. Nous l'approchons au milieu du fracas assourdissant des bombardements et des tirs aériens. Les obus sifflent au-dessus de nos têtes et proviennent de nos navires qui tirent en direction des plages.

La France est à moins de 100 mètres !


A SUIVRE .../...


Dernière édition par le Mar 21 Mar - 13:18, édité 1 fois
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Message  Bobabs Lun 20 Fév - 10:15

SUITE .../...
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Témoignage du Gi Bernard DARGOLS


A notre tribord se trouvait déjà une "landing craft VP" - barge plate -. De notre bateau pendait une échelle de corde dangereusement instable. Elle menait à cette barge. Atteindre cette dernière avec tout notre barda sur le dos, par cette échelle qui s'obstinait à bouger, a été un exercice que je n'ai pas aimé du tout.

Nos deux jeeps attendaient sur ce plateau mobile. J'ai pris place avec Wrenn et Mc Cormick dans celle que j'avais baptisée "La Bastille". Je me souviens très bien avoir tenté d'évaluer à ce moment là le pourcentage de chance que nous avions d'arriver intacts sur le sol français. Bref... ça m'embêtait de mourir si près du but... et noyé en plus ! En revanche, je ne sais pour quelle raison, j'avais la conviction que si j'arrivais à débarquer sain et sauf, je m'en tirerais.

"La Bastille" fonce sur une plage qui s'avère être Saint Laurent sur Mer, "Easy Red" selon notre code, en plein secteur connu sous le nom de Omaha Beach.

Une multitude de véhicules militaires recouvre toute la plage du Ruquet. Quelle activité sur cette plage ! Des soldats s'affairent au milieu de crépitements de balles et de grondements d'obus. Ils montent en file et longent un blockhaus déjà neutralisé par nos troupes. L'ordre est d'atteindre notre premier Quartier Général, Formigny. Le bruit infernal des gros canons résonne jusque dans nos ventres. Les obus passent sans cesse au-dessus de nos têtes, mais facilitent notre avancée vers l'intérieur.

Au moindre arrêt, il nous fallait creuser à l'aide de notre pelle un "fox-hole" - trou de renard -d'environ 50X150 cm, profond de 30 cm pour pouvoir y plonger, et être ainsi protégé en cas d'attaques aériennes.

Les premiers blessés sont rapidement évacués vers la plage et je me dis que les "medics" font un dur boulot ! Je vois pour la première fois des hommes morts. A cette horreur, s'ajoute l'odeur nauséabonde et insupportable du bétail crevé, enflé, qui nous entoure.

C'est vrai, j'avais souhaité débarquer le premier jour, non pas par bravoure, mais pour prendre l'ennemi par surprise, avant qu'il ne fasse appel aux renforts les jours suivants.

Comme prévu, nous collectons des informations qui confirment les positions de l'ennemi. Des milliers de tracts de 10x20 cm avaient été lancés ces derniers jours tout le long de la côte de Dunkerque à Cherbourg invitant les civils à s'éloigner (voir photo).


Nous avançons sur Trévières avec précaution car nous faisons connaissance avec les "hedgerows", ces haies de 3 à 4 mètres de haut qui dissimulent facilement les Allemands. Nous nous méfions également des "snipers", ces tireurs isolés et des "booby traps", des petits pièges placés derrière le bouton d'une porte, par exemple, qui explosent au moindre contact.

Nos incursions se multiplient dans le No Man's Land, terrain qui sépare nos troupes de celles des nazis. Le "pincement aux tripes" avant chaque sorties s'estompe peu à peu avec la routine. Ces escapades ne sont cependant pas recommandées pour le cœur ! A chaque sortie, j'étais accompagné d'un MP - Police Militaire -. Avant de monter dans la jeep, il fallait nous délester de tous documents, lettres, photos au cas où nous serions capturés, car seuls nos nom, grade et numéro matricule devaient être révélés : rien de plus.

Entre Formigny et Trévières, près de la colline 192, fatigués, sales, une surprise nous attendait : camouflée dans les champs, une douche de campagne d'une dizaine de mètres de long avait été dressée. Débarrassés de nos vêtements, on entrait par une extrémité, et on en ressortait par l'autre après être passés sous une douche chaude.

On nous distribuait alors un assortiment de linge, chaussures et treillis neufs ! Quel bonheur ! Il était temps car nous commencions à craindre que l'ennemi ne nous repère non pas à la vue mais à l'odeur !

Vers la fin juin 1944, en Normandie, les Gi's marchent les uns derrière les autres, en colonne, de chaque côté de la route. J'ai la chance d'être en jeep. L'ordre attendu arrive : "take ten" - dix minutes de pause -.

Certains s'allongent sur le sol pour profiter de ce repos bienvenu, d'autres se détendent en s'envoyant une balle de base bail. Un camarade sort des gants de boxe de sa jeep et me propose d'engager un round rapide avec lui. Notre combat est à peine commencé qu'une jeep s'arrête à notre hauteur. En descend un colonel du MG - Gouvernement Militaire - qui demande à mon "adversaire" de lui prêter ses gants pour faire quelques échanges avec moi. Ce colonel, dont je n'ai pas retenu le nom, se présente. J'esquisse alors une position de garde à vous et me présente à mon tour : "Sergent Bernard Dargols". Cette situation m'inquiète car le seul fait de lever la main sur un gradé est passible de cour martiale surtout en temps de guerre. Pas question de refuser sa proposition. En fait, c'est un ordre.

Mon père avait vu juste, il avait pensé que la boxe aiderait à me débarrasser d'une timidité maladive. J'avais donc derrière moi, en amateur, plusieurs années de pratique. Le colonel, un "vieux" d'une quarantaine d'années et moi-même, jeune de 24 ans, étions à peu près de la même taille. Trapu, il appartenait à une catégorie plus lourde et celui qui connaît ce sport sait combien le poids constitue un net avantage. Je compensais par une allonge supérieure. Pendant deux minutes, alors que lui visait ma figure sans retenue, je me bornais à le frapper au corps avec précaution. Malgré le respect dû à un supérieur, il arrive un moment où l'on ne peut se résigner à encaisser des coups sans répliquer. Il n'était plus question de doser le coup suivant. Pour m'aider à surmonter mon respect de la hiérarchie, j'ai imaginé son visage en croix gammée. Je lui ai donc décoché un seul direct appuyé à la face, qui m'a fait immédiatement craindre le pire. Heureusement pour nous deux, c'est le moment choisi par le colonel pour cesser ce combat amical. Avant de repartir dans sa jeep, il m'a lancé un "Well done" - bien joué - et un "good luck Bernard" - bonne chance -. Le tout avait duré 3 minutes à peine.

Mes cousins et amis, militaires français m'ont assuré qu'une telle scène n'aurait pu se produire, à l'époque dans leur armée. Elle reflétait bien un des aspects que j'avais apprécié dans l'armée américaine : des relations humaines, à la fois décontractées et respectueuses.

Aidés par quelques rencontres avec des résistants, nous avons libéré plusieurs villages : Saint Clair sur Elle, Littry, Bérigny, Vire et d'autres, sans oublier Saint Georges d'Elle perdu pour repris.

Notre Quartier Général s'est installé à La Boulaye près de Cerisy-La-Forêt que nous venons de libérer. Le front s'est stabilisé mais nos activités continuent à partir de cette base, contacts, renseignements...

Nous sommes depuis deux mois à Cerisy lorsque des informations alarmantes nous parviennent grâce à des civils : les ennemis, par une activité inhabituelle et leurs préparatifs nous laissent entrevoir une éventuelle contre-attaque surprise. J'avais encore en tête Saint Georges d'Elle que nous avions libérée dans la douleur et la joie, puis brusquement perdue et re-libérée. Quelles conséquences tragiques si une telle situation se reproduisait à Cerisy-La-Forêt ! Le sergent Thierry Mc Cormick "Toto" et moi-même décidons, pour ne pas alerter la population de ce possible danger, de faire des rondes dans le village. Nous patrouillons côte à côte, calmes et rassurants, devisant le plus joyeusement possible, mais armés évidemment. Notre attitude ne laisse à aucun moment transparaître l'éventualité d'un danger imminent. La contre-attaque n'a jamais eu lieu, au contraire, c'est notre division qui a pris l'initiative et déclenché la percée qui devait mener à la déroute des nazis.

Dans la série des grandes peurs, il y avait celle qui, lorsque couché sous la tente, en pleine campagne, et que, dans la nuit silencieuse, un très léger grondement se fait entendre. Il s'amplifie lentement. Aucun doute, des chars, le tout est de rapidement discerner si ce sont les nôtres ou ceux de l'ennemi.

Dans le cadre de la coopération franco-américaine notre équipe s'était enrichie de deux officiers, gaullistes bien sûr, Fouquet et Christophe. Appelés à d'autres fonctions, ceux-ci sont restés trop peu de temps. Cependant, j'ai gardé par la suite des contacts amicaux avec le fils du capitaine Fouquet.

Ma mission consistait dès Cerisy libérée à me mettre en rapport avec le pharmacien du village, Le docteur Champain. Ce dernier, résistant de l'ombre, devait me fournir des renseignements fiables. Mais en entrant dans l'officine, je trouvais sa fille tout de noir vêtue : son père avait été tué la veille dans un bombardement allié. Je comprenais son malheur mais ce qui est un comble, avec le recul, est que c'est elle qui a cherché à me réconforter : elle est allée dans l'arrière boutique et en a rapporté un petit flacon d'élixir parégorique. « Mélangez-le avec de l'eau, vous obtiendrez une sorte de pastis et ça vous fera du bien » m'a-t-elle dit.

Je revois de temps à autre la fille du docteur Champain, son frère et sa belle-sœur. Comme avec la famille Champain, j'ai conservé des liens d'amitiés très forts avec plusieurs habitants, certains maires et leurs familles. Beaucoup parmi eux étaient des gamins d'une dizaine d'années auxquels je distribuais chocolats et chewing-gum dans leur village libéré. Ils étaient si heureux de parler français avec un Gi et de monter dans sa jeep, qu'ils me disent que 60 ans plus tard ces moments sont toujours gravés dans leur mémoire.

Comment mesurer la dose d'émotion qui m'envahit lorsque je retrouve ces enfants âgés maintenant de 70 ans et plus, qu'ils me serrent affectueusement la main, m'embrassent ou m'invitent dans leur famille.

Pendant que nous étions basés à Cerisy-La-Forêt un sergent du Signal Corps, le service photographique de l'armée, m'a contacté. Il souhaitait que je trouve une jeune fermière en sabots. Quelques jours plus tard, Marie-Jeanne Brassard a accepté de venir poser avec deux Gi's au nom de l'amitié franco-américaine. Nous devions aider cette jeune femme à remplir d'eau les deux seaux vides qu'elle portait suspendus à une planche. (voir photo)

TEMOIGNAGES Tmoignagedugibernarddargolscer


Le 1er juillet 1944, cette photo composée est passée à la une de presque tous les journaux américains. Le texte l'accompagnant donnait mes nom et adresse à New-York et stipulait qu'elle avait été prise quelque part en France. C'est ainsi que famille et amis ont enfin appris que j'avais débarqué et étais sain et sauf. En effet, depuis le début du mois de juin, la censure qui voulait empêcher tout indice susceptible d'alerter l'ennemi, avait bloqué le courrier des militaires. Ce soutien moral nous manquait beaucoup.

A l'occasion du quarantième anniversaire du débarquement, et grâce au journal Ouest-France, j'ai retrouvé Marie-Jeanne, nous avons posé devant ce même four à pain. Il y a 5 ans, elle m'a avoué combien elle avait eu du mal à persuader sa mère qui ne voyait pas du tout d'un bon œil qu'elle suive ces Gi's qu'elle ne connaissait pas et qui insistaient pour la prendre en photo !

Lorsque la percée alliée a démarré en août 44, j'ai reçu l'ordre d'aller à Brest. Cette ville était alors connue sous le nom de 'poche de Brest' car c'était la seule partie de Bretagne encore aux mains de l'ennemi. Une fois sur place, régulièrement je retournais vers nos lignes arrières afin de rendre compte des informations recueillies. Lors de ces trajets répétés, il m'arrivait de croiser des prisonniers de tous âges, la tête basse, gardés par des MP à Guipavas, village non loin de Brest. L'arrogance de leur attitude et de leur regard avait disparue. J'avoue avoir ressenti une grande jubilation intérieure ! Je me fis même le malin plaisir de désigner deux prisonniers qui durent bien briquer ma jeep. C'est donc avec la jeep la plus propre de la division que je suis retourné à Brest, toujours occupée par les nazis.

Une fois Brest reprise par les Américains, j'ai parcouru de nombreux kilomètres, du Vésinet : Les Ibis, à Saint-Vith et Bastogne en Belgique, une pointe en Allemagne, pour être rappelé à Paris.

Dans la capitale libérée ma mission consistait à écarter des personnes qui cherchaient un emploi avec les forces américaines et dont la conduite n'avait pas été irréprochable pendant l'occupation. Je les recevais et interrogeais dans les locaux de l'ex-kommandantur, place de l'Opéra.

Dans les deux palaces de la rue Castiglione, Meurice et Lotti, ma mission était différente. Les deux hôtels avaient été réquisitionnés et occupés par des hauts dignitaires nazis. J'étais chargé de déterminer la nature des relations de ces locataires.

J'avais donc installé un bureau dans le hall et faisais défiler tout le personnel y compris la direction. Dans les deux cas, contrôles de papiers d'identité et interrogatoires s'ensuivaient. Avant de terminer ce circuit par Châlons-sur-Marne, aujourd'hui Châlons-en-Champagne, dans une unité anti-terroriste, le CIC - contre-espionnage -, j'ai fait un court passage à l'Ambassade des Etats-Unis pour y trier des documents classifiés secrets.

Le bateau qui me ramenait aux Etats-Unis est parti de Marseille en janvier 1946. J'ai été démobilisé à Fort Dix, New-Jersey, quelques jours plus tard. La boucle était bouclée.

Sur la plage d'Omaha la sanglante s'étend le grand cimetière américain de Colleville au gazon si bien entretenu, aux rangées de tombes impeccablement alignées. Elles recouvrent 10000 jeunes Gi's morts en juin 1944 pour que le monde, enfin, retrouve la liberté. L'amitié franco-américaine leur doit tant !


Bernard Dargols. Octobre 2004
TEMOIGNAGES Ui8wy


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Message  Bobabs Lun 20 Fév - 10:17

Témoignage du vétéran Marcus HEIM


TEMOIGNAGES Insignedela82ndairbornedivisio TEMOIGNAGES Insignedu505thinfanteryparachu
Insigne de la 82ème Airborne. Marcus Heim en 1944. On remarquera l'insigne du 505th infantery parachute regiment sur son calot, dont le liseré est bleu ciel

Le récit qui suit a été recueilli à Sainte Mère Eglise, le 7 juin 1997, auprès de Marcus Heim lui-même, à quelques encablures de sa Drop zone du D.Day. Le 6 juin 1944, le private first class Heim est pourvoyeur lance-roquettes à la compagnie A du 505th Parachute Infantery Regimental (82ème Airborne). Son premier contact avec l'Europe aura lieu dans un petit village de Normandie, qui deviendra célèbre dans le monde entier : Sainte Mère Eglise. Marcus Heim nous a quittés récemment, en octobre 2002.

" Un peu après minuit, ce 6 juin 1944, je sautais d’un avion C47, sur la Normandie, avec la 82e Division Aéroportée. L’objectif de la 82e était les carrefours de SAINTE MERE EGLISE ainsi que les vallées du MERDERET et de la DOUVE. Je me trouvais avec la Compagnie A du 505 et notre objectif était le pont de LA FIERE, sur le MERDERET. Je me posais à environ 25 pieds d’une route et avant même d’avoir eu le temps d’assembler mon USM1, j’entendis une moto qui approchait. Comprenant que je ne pourrais me servir mon arme, je laissais les 2 soldats Allemands me dépasser. Une fois qu’ils furent passés et mon fusil assemblé, je me mis à la recherche des autres parachutistes et de notre équipement, puis nous nous dirigeâmes vers le pont du MERDERET. Nous devions le tenir jusqu’à l’arrivée des soldats qui devaient débarquer un peu plus tard ce jour, mais en fait ce ne fut que trois jours plus tard qu’ils réalisèrent la jonction.Lorsque vous vous trouvez au pont de LA FIERE en direction de SAINTE MERE EGLISE, le manoir se trouve à droite (c’était nos quartiers). Il se compose de plusieurs bâtiments. Les allemands qui occupaient le château venaient d’en être délogés par notre compagnie après de rudes combats(3). Lorsque vous vous dirigez vers SAINTE MERE EGLISE, le route se trouve dans une côte et part vers la gauche.

En face du manoir, je remarquai un chemin de terre (qui aujourd’hui est goudronné) d’environ 4 pieds de large. Vers CAUQUIGNY, la route était bordée d’arbres et inondée, ainsi que les champs avoisinants. Le village de CAUQUIGNY est distant de 800 ou 900 yards du pont ; il était d’ailleurs tenu par les Allemands. Je me souviens que la route obliquait à droite à 60 yards de notre position.

Courant juin 1944, dans une ferme de Normandie, Heim et plusieurs de ses camarades et supérieurs sont décorés par le général Omar Bradley. Marcus se trouve à l'extrême droite.

TEMOIGNAGES Marcus29ek


Je ne me souviens plus exactement combien d’autres parachutistes se trouvaient autour de nous. Tout ce que je vis, du reste, était une mitrailleuse installée à l’intérieur du manoir. Du côté droit, en arrière du chemin, quelques fantassins étaient postés. Il y avait également un canon de 57 mm au-dessus de la route, dans notre dos, avec une autre mitrailleuse. Nous pûmes ramener de notre DZ des mines antichars et des roquettes de bazooka. Nous plaçâmes les mines en travers de la route, à 50 ou 60 yards de notre position, de l’autre côté du pont. Toute la journée, les Allemands bombardèrent notre position et la rumeur courait qu’ils allaient lancer une contre attaque. C’est ce qu’ils firent vers 05h00 de l’après- midi.

Deux chars(4) accompagnés d’éléments d’infanterie(5) en arrière et de chaque côté se présentent alors, suivis d’un troisième blindé et de grenadiers en nombre encore plus important.Le tank de tête s’arrêta dans le virage, le chef d’engin sortit la tête de la tourelle afin de prendre une vision d’ensemble ; la mitrailleuse à notre gauche laissa entendre un crépitement et abattit le chef de char. Au même moment, les bazookas, le canon de 57 et tout ce qui était en état de faire feu prit les Allemands à partie. L’ennemi riposta au moyen de mortiers, mitrailleuses ; Lenord PETERSON et moi-même (qui étais pourvoyeur) quittâmes donc notre position initiale ; nous sortîmes de notre trou de combat et nous postâmes devant le poteau téléphonique, d’où nous avions un meilleur angle de tir. Nous avions dû retarder l’ouverture du feu car trois branches en bord de route nous interdisaient toute visibilité.

Le premier tank était touché et se mit à décrire un arc de cercle, mais dans le même temps la tourelle s’orienta vers nous et nous fûmes pris à partie. PERTERSON et moi-même eûmes à peine le temps de nous éloigner du poteau lorsqu’un tir Allemand le détruisit. Nous parvînmes néanmoins à quitter l’endroit avant qu’il ne tombe. J’espérais que BOLDERSON et PRYNE puissent eux aussi faire feu sur les blindés, car avec tout ce qui se déroulait face à nous, il nous était impossible de savoir comment cela se passait pour les autres. Nous continuâmes à tirer sur le premier char jusqu’à ce qu’il soit totalement neutralisé. Le second blindé qui le suivait le poussa hors de la route.. Nous ouvrîmes le feu sur ce tank qui fut touché entre la caisse et la tourelle ; une chenille fut détruite grâce au tir suivant alors qu’un troisième coup au but le fit s’enflammer. Mais, PETERSON et moi-même étions maintenant à cours de munitions lorsque le troisième char se présentait déjà face à nous. Mon équipier me demanda de retourner en arrière de la route afin de voir si BOLDERSON ne détenait pas quelques roquettes supplémentaires.

Je me précipitais donc de l’autre côté de la route, sous un feu si nourri qu’il me serait difficile de le décrire ; toujours est-il que je parviens à gagner le point d’une seule traite. Je ne trouve alors qu’un soldat mort sur l’emplacement : BOLDERSON et PRYNE ont disparu. Leur bazooka est abandonné dans l’herbe et hors d’usage si j’en juge aux nombreux impacts qui le criblent. Je suppose donc que l’un d’eux et peut-être même les deux à la fois ont été blessés. Je parviens toutefois à trouver quelques roquettes abandonnées par mes camarades et entreprends de retourner sur ma position, où est resté PETERSON. Les Allemands continuaient à nous arroser de projectiles de tous calibres, mais ce jour-là la chance était avec moi ; c’est sans la moindre égratignure que je parvins à rejoindre notre emplacement. Avec nos roquettes supplémentaires, PERTERSON et moi pouvions maintenant neutraliser le dernier char, ce que nous parvînmes d’ailleurs à faire. Une fois le tank détruit, les Allemands battirent en retraite vers CAUQUIGNY, mais continuèrent de nous harceler la nuit entière. Ils tentèrent également, mais sans plus de succès, deux nouvelles contre attaques.

Lorsque l’ennemi se retira enfin, PETERSON et moi étions toujours sur notre position, à côté du pont de LA FIERE. A la fin du combat, nous pûmes enfin nous livrer à un tour d’horizon. En nous attardant vers la route de SAINTE MERE EGLISE, nous vîmes que notre canon de 57 et la mitrailleuse étaient détruits .En retrait du chemin de terre du manoir, nous ne trouvâmes personne. Nous étions persuadés d’être les seuls survivants et qu’il valait mieux désormais abandonner la position, lorsqu’un groupe nous rejoignit et nous demanda de continuer à tenir le point , plusieurs autres hommes vinrent d’ailleurs nous renforcer. Nous devions rester sur notre position jusqu’à l’arrivée des soldats qui venaient de débarquer(6) . Nous avons appris quelque temps plus tard que peu d’entre nous avaient survécu. La plupart des soldats de l’unité étaient morts ou portés disparus(7).

Seul le Bon Dieu sait pourquoi nous en sommes sortis indemnes, ce jour là. Voici ce dont je me souviens de ce 6 juin 1944.


APPENDICE

(1) – Texte traduit de l’Anglais par l’auteur.

(2) – Lors du parachutage du 6 juin 1944, la composition de la 82e A.B était la suivante : Trois régiments aéroportés (505e, 507e et 508e ) à trois bataillons, l’artillerie divisionnaire (trois bataillons sur planeurs, les 319, 320 et 456th Glider Field Artillery Bataillon et un bataillon aéroporté, (le 376th Parachute Field Artillery Bataillon), un bataillon du génie, une compagnie médicale, une compagnie de transmission (Signal Corps) et une compagnie d’état major.

(3) – Ces combats ont duré jusque vers 12h00, le 6 juin. Sur 136 hommes de la Compagnie A, 134 réussissent à se regrouper dans les instants suivant leur atterrissage . Ils se portent vers le groupe de maisons appelé " Le Manoir " et sont immédiatement cloués au sol par le feu très nourri des Allemands qui occupent les lieux. Seule l’arrivée sur place du Général RIDGWAY permettra de débloquer la situation après deux assauts successifs. Peu après midi , 8 survivants se rendent aux AIRBORNE. On dénombra par ailleurs 12 cadavres dans les bâtiments. Ainsi, pendant plus de dix heures, 20 allemands ont mis en échec 300 parachutistes (Compagnies A et B/505e P.I.R)

4) - Il s’agit vraisemblablement de chars de capture HOTCHKISS H39 malgré le fait qu’on ait souvent évoqué la présence RENAULT R35. Ces blindés appartiennent au PANZER BATAILLON N° 100, rattaché à la 91e D.I et équipé de matériels Français et Russes obsolètes. Plusieurs photographies prises dans les jours qui ont suivi le débarquement montrent également d’autres engins tels que PANZER IV, motos chenillées KETTENKRAD, CHENILLETTES LORRAINE avec affût antichar PAK 47.

(5) – Cette unité est le GRENADIER REGIMENT 1057, rattaché à la 91ème Division d’Infanterie. Le Général FALLEY, commandant cette division, sera d’ailleurs abattu , quelques heures plus tard par des éléments du 508e P.I.R aux abords de PICAUVILLE (50).

(6) – 4e DIVISION D’INFANTERIE U.S débarquée le 06 juin 1944 à UTAH BEACH

(7) - Sur 136 officiers et hommes de troupe de la Compagnie A, seulement 33 regagneront leur base anglaise au mois de juillet 1944 (reconditionnement avant l'opération Market Garden)



Marcus HEIM
Sainte Mère Eglise, 07 juin 1997.


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TEMOIGNAGES Empty Témoignage de Jack Schlegel

Message  Bobabs Lun 20 Fév - 10:18

Témoignage de Jack Schlegel TEMOIGNAGES Jackschlegel0du

Merci à Dominique François, Président du cercle historique de l'US AIRBORNE, dont les travaux ont permis de concevoir cette page
Parachuté le 6 juin avec son régiment, appartenant à la 82e Airborne, Jack Schlegel s'illustrera d'emblée dans l'embuscade tendue au général Allemand Falley, commandant la 91e D.I.

Engagé volontaire dès 1941, Jack rejoint la nouvelle arme des parachutistes. Après avoir commencé l'entraînement à Camp Benning, puis à Fort Blending en 1943, Schlegel est affecté au 3e bataillon du 508e regimental infantery parachute (commandé par le colonel Roy Lindquist). L'unité rejoint le camp Shanks à new York avant noël de cette même année. Puis, les choses s'accélèrent. Le 27 décembre 1943, le régiment est acheminé en bateau vers l'Irlande. Transportés à bord de l'U.S.S James Parker, les paras accostent à Bast le 8 janvier 1944. Après un entraînement complémentaire, ils rejoignent ensuite Nottingham le 11 mars, en attendant le jour J.
Le 6 juin 1944 vers 01h00, le stick du caporal Schlegel survole la Normandie dans un C.47. La défense anti-aérienne Allemande prend violemment à partie les appareils alliés ; le moteur gauche du Dakota est touché, l'avion perd brusquement de l'altitude, les portes sont ouvertes tant les émanations d'essence sont insupportables. Les paras s'extirpent de l'appareil sans effectuer les vérifications d'usage. Jack saute en dernière position. Quelques secondes plus tard, l'appareil explose. La chute du stick aura duré moins de trente secondes, mais le sol gorgé d'eau amorti l'atterrissage. Sans ce coup du sort, les paras avaient les os rompus...
L'histoire extraordinaire de Jack
Certains verront à travers ces lignes, la confirmation que dans notre vie rien n'est du au hasard. D'autres encore pencheront pour le concours de circonstances. Je laisse à chacun le soin d'interpréter ce qui suit.

Le 6 juin 1944, au cours de la nuit, Jack fait une halte dans une ferme afin de demander sa route. il est chaleureusement accueilli après avoir expliqué qu'il était "un américain parachutiste". Le fermier propose au petit groupe de partager une collation .En témoignage de reconnaissance, Jack offre son insigne de parachutiste à la femme du Normand. Puis, il poursuit sa route. Dès lors, les combats ne lui permettront plus de revoir ceux qui l'avaient reçu à bras ouverts.

Les Américains se regroupent progressivement, puis se portent après avoir fait le point vers Sainte Mère Eglise.
Le groupe rejoint d'autres éléments de l'unité sur la route de Picauville, près du château de Bernaville. C'est là qu'aura lieu l'embuscade, montée par le lieutenant Malcolm Brannen (Etat major/ 508e) et qui coûtera la vie à Wilhlem Falley, commandant la 91e D.I de la Wermacht. Ce coup de main aura une incidence directe sur la suite des évènements dans le secteur d'Utah Beach, car il provoquera un flottement sensible dans le commandement de la division pendant plusieurs heures et retardera considérablement la contre attaque Allemande. A l'intérieur de la voiture de l'officier, Jack découvre un drapeau nazi qu'il cache dans une ferme et compte revenir le chercher dans la journée (Aujourd'hui, ce drapeau est exposé au musée de Sainte Mère Eglise)
Quelque temps plus tard, alors qu'ils ont fait trois prisonniers, Jack et ses camarades sont pris a partie par un char ennemi et des éléments d'infanterie ; l'un des captifs s'élance vers le blindé en criant de cesser le feu. Encerclés, les parachutistes se rendent. Le groupe est conduit dans la cour d'un château, en compagnie de 250 autres prisonniers Américains. Tous sont transférés dès le lendemain vers St Lô. Mais, durant le trajet, le convoi est mitraillé par l'aviation alliée. 110 hommes seront tués ou blessés. Jack tente de s'échapper à la faveur de la confusion provoquée par l'attaque ; il est repris aussitôt... Par ailleurs, il tentera deux autres évasions sans plus de succès. Il est envoyé à Rennes où il sert d'interprète au docteur Enzinger. Celui-ci lui apprend l'avancée des troupes du Général Patton et lui explique que la guerre est maintenant perdue. Il remet un Schlegel un laisser passer pour rejoindre un autre hôpital de Rennes ; le para en profite pour prendre le large et rejoint les résistants Bretons. Deux jours plus tard, il se trouve derrière les lignes alliées et aura même le rare privilège de savourer un whisky en compagnie de Patton. En retournant vers Utah Beach, il fait une halte à la ferme où le drapeau pris aux Allemands est dissimulé ; celui-ci s'y trouve toujours... Quelques jours plus tard, le 508e PIR est embarqué vers l'Angleterre avant d'être de nouveau parachuté en Hollande en septembre 1944. Jack sera de l'expédition avant de combattre dans les Ardennes.

En juin 1984, Jack Schlegel retourne en France et part à la recherche de l'endroit, où quarante plutôt il avait fait sa halte. Mais il se perd et s'arrête alors demander son chemin, car les lieux ont bien changé. Il entre dans une ferme explique ce qui motive sa démarche ; on le prie alors de rentrer dans une chambre, au chevet d'une vieille dame mourante. Celle-ci demande qu'on lui apporte sa boîte à mouchoirs. Elle l'ouvre et présente à Jack un insigne de parachutiste sur lequel il reconnaît ses initiales. Paralysé par l’émotion, il réalise alors que cette femme est celle à qui il l'avait donné au matin du 6 juin 1944 !... La vieille dame lui confie enfin qu'elle avait toujours su qu'un jour le jeune Américain qui lui avait remis ce présent reviendrait. Elle pouvait maintenant quitter ce monde totalement comblée.

Malgré les années qui passent, Jack Schlegel retourne tous les ans en Normandie. Il est très attaché à cette région où il compte de nombreux et vrais amis.
TEMOIGNAGES Jackschlegel1my


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TEMOIGNAGES Empty Témoignage de Kelly Lynch

Message  Bobabs Lun 20 Fév - 10:20

TEMOIGNAGES Leprivatekellylynchen19446nx Kelly Lynch en 1944 TEMOIGNAGES Insignedela30ediustheoldhickor1 Insigne de la 30e DI.US, The Old Hickory

Le combat de la côte 314, à laquelle M. Lynch a participé, est l'un des plus hauts faits d'armes de la Bataille de Normandie tout en étant parodoxalement l'un des moins connus. C'est en grande partie grâce au sacrifice héroïque des boys de la "Old Hickory Division" que la poche de Falaise sera fermée. voici l'histoire du 2nd Batallion, surnommé le "Bataillon perdu".

Né en 1920 à Union County, Tenessee, Kelly Lynch est le troisième d'une famille de 12 enfants. "...Je me suis engagé dans l'Armée des Etats-Unis le 19 septembre 1942 et j'ai débuté l'entrainement à Camp Blanding en Floride. Puis, j'ai participe avec mon unité d'instruction à des manoeuvres dans le Tennessee, avant de gagner le camp d'Aterberry, Indiana. Au cours de l'année 1943, on m'a affecté au 120e d'infanterie, régiment intégré à la 30e DI, surnommée "the Old Hickory" . Je me trouvais à la compagnie F, commandée par le capitaine Erickson, l'homme qui a tenu la cote 314. Ma section était placée sous les ordres du lieutenant Fairbanks.

Conduite à New York, la division prend la route pour l'Angleterre. Kelly embarque à bord de l'USS Argentina, vers cette Europe en guerre qu'il ne connait pas autrement que dans les livres d'images, comme la plupart de ses jeunes compatriotes.

Sur place, la division reçoit un complèment de formation. Pour sa part, Kelly est formé au service de la mitrailleuse de cal. 30 sur trépied : Il devient chef de pièce et le sera à Mortain, face à la division Das Reich.

Sur place, la division reçoit un complèment de formation. Pour sa part, Kelly est formé au service de la mitrailleuse de cal. 30 sur trépied : Il devient chef de pièce et le sera à Mortain, face à la division Das Reich.En mai 1944, le 120e d'infanterie est prêt au débarquement, le moral est d'un très haut niveau, malgré le temps exécrable et le vent qui balaie incessamment les côtes britanniques. La 30e D.I est prévue en second rideau, à J + 7

PREMIERS COMBATS

Le 13 juin 1944, Kelly Lynch aborde les côtes Françaises à Omaha Beach. Il est soldat au 2e bataillon, compagnie F, et affecté au service d'une mitrailleuse 30. La division est aussitôt engagée, le 120ème RI libère Montmartin-en-Graignes dès le lendemain et se positionne sur la ligne Canal de la Vire-La Taute. Les premières semaines de combat sont consacrées a asseoir les positions alliés durant la "Bataille des Haies". Les pertes sont lourdes et les Américains progressent difficilement. Kelly remarque l'accueil chaleureux des Normands : "Ils furent merveilleux avec nous, mais beaucoup avaient fui à cause de la dureté des combats, je me souviens d'une jeune Normande, qui nous offrit du lait frais, par deux fois..."

TEMOIGNAGES Infanteriedanssaintlo8zq Entrée de la 29e division d'infanterie dans SAINT LO.

Les 24 et 25 juillet 1944, le 120e RI est aux abords de Saint Lo, lorsque 1500 bombardiers déferlent sur cette même Panzer-lehr, déversant 6.000 tonnes de bombes sur ce qui sera quelques heures plus tard le fantôme d'une division d'élite.
SAINT LO, VILLE MARTYRE

Le 7 juillet, les 117è et 119e RI franchissent la Vire tandis que le 120è franchit la ligne de front, établissant une tête de pont à St Jean-de-Daye permettant à la 3ème DB.US de progresser. Leur offensive est contrariée par la Panzer-Lehr de Bayerlein, certainement la meilleure unité blindée présente sur le front Normand. Périers est libéré après de durs affrontements le 14 juillet, jour de fête nationale Française.

Le private Lynch est à ce moment à quelques dizaines de mètres du Général Mc Nair, commandant en chef des forces terrestres des Etats-Unis. Des avions de la Task Force commettent alors une tragique méprise :"Ils nous ont bombardés par erreur, relate M. Lynch, et j'étais aux première loges si je puis dire. J'ai juste eu le temps de sauter dans un fossé, entouré de gravats... C'est ce qui m'a sauvé la vie. Le général a eu moins de chance que moi, il a été tué, par nos propres avions. c'est à proximité de cet endroit que le capitaine Bell, qui commandait notre bataillon a été tué, il se trouvait dans un blockhauss"... Le capitaine Ernest W.Bell (matricule n° 0462628) fut décoré de la "Silver Star" et de la "Purple Heart". Son corps repose au cimetière d'Omaha, plot 7 , rang A, tombe 14. (Sources René Bonatti).On relevera 111 corps de soldats Américains, bombardés par les leurs. Ce jour-là, l'enfer était descendu sur terre, aux portes de Saint Lô. La Panzer Lehr a cessé d'exister, elle a été pulvérisée, réduite à néant, écrasée sous 6000 tonnes de bombes. Victoire tactique incontestable, la bataille pour Saint Lô aura couté un mort par mètre gagné aux divisions Américaines...

Les combats furent terribles, confie Kelly Lynch. Je me me souviens de cet instant ou j'ai vu un Panzer IV avancer droit sur nous. Notre position ne nous permettait pas de reculer ou de nous protéger. Je suis resté pétrifié en me disant que c'était la fin et qu'il ne me restait qu'à mourir. il m'était impossible de faire le moindre geste, j'étais paralysé, sans pouvoir faire quoi que ce soit. Au bout de quelques secondes, j'ai senti que quelqu'un me tirait le pied, cela m'a fait réagir : c'etait le Lieutenant Fairbanks, mon chef de section, qui me jeta : allez Lynch ! on continue ! Réagis !... C'est ainsi que nous avons finalement détruit ce blindé. Je crois que sans l'aide du lieutenant, j'aurais été écrasé sous les chenilles du char, sans esquisser le moindre geste . Ces "moments de vide" sont arrivés à presque tout le monde, nous étions tellement sous pression que nos nerfs nous jouaient des tours de temps à autre, d'un côté comme de l'autre".

Les Allemands sont les grands perdants de la bataille pour Saint Lo. Les deux régiments de grenadiers de Bayerlein (985e RI et KG Heinz) ont perdu 1000 hommes, soit 50 pour cent de ce qui leur restait. Seuls 7 chars Panther et un canon parviendront à sortir du brasier dont la fumée noire s'élève à plus de 1000 mètres dans le ciel. A l'origine, cette division d'elité totalisait 15.000 hommes et 250 blindés lourds. Saint Lô est tombée, mais les américains ne libèrent qu'un champ de Ruines ; tout comme la Panzer-Lehr, elle avait péri elle aussi.

A Dangy, après l'anéantissement de la Panzer Lerh, un officier de Von Kluge vient à la rencontre du général Bayerlein en lui demandant de tenir la ligne de front Périers-Saint Lô.

La réponse du général est cinglante. Elle reflète aussi le sentiment partagé par la majeure partie des unités allemandes en cette mi-juillet 44 ::"Général, soyez assuré que tout le monde tiendra. Mes grenadiers tiendront, de même que mes chasseurs de chars. Aucun n'abandonnera sa position.Ils sont tous morts dans leurs trous. Vous direz au Maréchal que la Panzer Lehr n'existe plus et il qu'il n'y a plus que des morts"...

.Le 25 juillet 1944, la "Old Hickory" dépasse Saint Lo dans le cadre de l'opération COBRA. La division libère Troisgots le 31 juillet 44 et relève la "Big Red One" près de Mortain le 4 août 44. Le 2è bataillon du 120e RI prend position sur la cote 314, point de vue dominant la Normandie et ouvrant vers la Bretagne. Cette position leur a d'ailleurs été indiquée par deux Mortainais, M. Josset et son fils Jean. Les G.I's creusent leurs emplacements de combat et attendent la contre attaque Allemande, baptisée opération Luttich ("Liège"). Décidée par Hitler et son etat-major, elle est supposée briser la percée Américaine au sud d'Avranches et créer une base d'opération décisive contre "le front d'invasion allié". Contre l'avis de Jodl, Von Kluge a prévu d'attaquer le 7 aout 1944.

.../... ASUIVRE


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TEMOIGNAGES Empty Le témoignage de Kelly LYNCH

Message  Bobabs Lun 20 Fév - 10:21

.../... SUITE

Kelly Lynch en 1944

Les 1er et 2e bataillon du 120e investissent les lisières ouest de Mortain. L'opération Luttich a pour but de briser la percée alliée et permettre à la VIIe Armée de se réorganiser. Si l'opération échoue, les derniers espoirs Allemands s'envoleront. Les 117 et 119e Régiments d'infanterie se positionnent au nord de Mortain. Face à la 30e D.I, quatre divisions blindées (incomplètes) vont tenter de percer : les 1ere ("Liebstandarte Adolf Hitler") et 2ème SS Panzer Division ("Das Reich") , la 2e Panzer (qui sera d'ailleurs laminée quelques jours plus tard par la division Leclerc) et la 116e panzer division. deux Kampfgruppe de la 17e SS Panzer ("Goëtz Von Berlichingen") se joignent au dispositif, au nord de Sourdeval. Sur la côte 314, se trouvent également neuf civils Normands, qui partageront durant 6 jours les vivres dont ils disposent et le sort de leurs 800 compagnons alliés.

Sur place, la 30e DI est renforcée par des éléments des 4e et 9e DI, ainsi que par des blindés du combat Command B de la 3e D.B. Le 7 août, vers 01 heure, l'opération débute : les 1ere, 2e et 17e SS panzer passent à l'offensive et bousculent les éléments Américains qui perdent Romagny. Néanmoins, ils se ressaisissent rapidement et s'accrochents becs et ongles aux collines 314 et 285. ils sont appuyés par une offensive aérienne, pendant laquelle 150 chars allemands seront détruits par les roquettes des Typhoons.

TEMOIGNAGES Unecolonnedela30edienjuillet19
Dans le secteur de St Lô, vers le 25 juillet, la 30th Infantry Division monte en ligne

Kelly Lynch partage son emplacement de combat avec son chef de groupe, le sergent Farris, face au carrefour de Blanche l'Abbaye. La compagnie F est repartie tout autour du point coté 314, aux ordres du capitaine Reynold Erickson. "Je me trouvais de l'autre coté de la colline par rapport au Cne Erickson, lorsque les Allemands le firent prisonniers durant les combats, j'ai tout vu sans pouvoir faire quoi que ce soit pour lui. En ce qui me concerne, j'étais à proximité d'un carrefour, au bas de la colline, nous avions pour mission de constituer un bouchon antichar ". L'appui est fourni par un peloton du 120e renforcé par le 823rd Tank Destroyer Bataillon. Cet apport sera d'une aide inestimable tout au long de l'offensive Allemande, ou plus de 40 blindés seront détruits.

En outre, les tirs de barrages américains empêchent l'ennemi qui a reconquis Mortain toute jonction vers les artères décisives et convoitées. La capture de la ville ne leur est donc d'aucune utilité. Dans la journée du 7 aout, les "assiégés" recoivent le renfort d'éléments de la 35 e DI et d'un détachement mixte de la 2e DB du général Leclerc (Spahis et Chasseurs d'Afrique), qui prennent position au sud du dispositif, vers Barenton. Une fois encore, le tribut payé par la population est lourd : plus de la moitié des 394 habitations de la ville sont détruites ou inhabitables, 1111 des 1726 habitants sont sans abri.

Sur la colline 314, les pertes sont élevées, mais Kelly et ses camarades s'accrochent à leurs positions, repoussant les attaques Allemandes les unes après les autres. Bientôt, tout vient à manquer : vivres, munitions, plasma, eau... Profitant de la situation quasi-desespérée, un émissaire SS se présente le 10 aout 1944 au capitaine Rohmiller et au sergent Wingate qui accueillent sa demande de reddition sur ses mots : Allez au diable et fichez le camp de cette foutue colline si vous ne voulez pas qu'on vous descende !!!.. Plusieurs tentatives d'intimidation seront réitérées par les SS, un blessé Américain retorquant à l'un d'eux : " I want no truce with those bastards !!!" (Pas de trève avec cette racaille). Ces tentatives s'étant toutes soldées par un refus catégorique des boys du "bataillon perdu" les assaillants imaginent tous les subterfuges, y compris les intrusions dans les lignes U.S au moyen d'uniformes américains, pris sur des morts. Heure après heure, la soif se fait plus tenace, les munitions deviennent rares, les boys tombent les uns après les autres. Quelques parachutages de munitions, de sang et de vivres seront effectués mais la plupart tomberont dans les lignes Allemandes. Malgré une situation desespérée, le 2e bataillon ne cède rien ; autour de Mortain, tous se battent avec le même courage. Pendant cinq jours et cinq nuits, les attaques Allemandes se succèderont et se solderont toutes par un échec, alors que sur la colline 314 et ses abords, les pertes sont de plus en plus lourdes, le "Bataillon perdu" continue de s'accrocher à son caillou avec la fureur du desespoir.

L'ensemble du front Américain continue de tenir, malgré plusieurs jours de combat ininterrompu. Peu à peu, l'ennemi va deserrer son étreinte, Jodl lui-même ne croyant plus au succès de l'opération Luttich. Les efforts demandés par Hitler pour contenir le front vont conduire l'armée Allemande à sa perte et au désastre de Falaise deux semaines plus tard.

L'ennemi continue pourtant les tentatives d'intrusion dans les lignes d'Américaines, en utilisant les subterfuges les plus divers: "Alors que je me trouvais dans mon emplacement de combat avec le sergent Farris, nous avons vu arriver face à nous, à environ cent mètres un fantassin Américain armé de quelque chose qui ressemblait à un fusil anti-char. C'était vraisemblablement un observateur d'artillerie. Pourtant, sans expliquer pourquoi, j'ai eu la certitude que quelque chose ne collait pas.... Nous l'avons laissé approcher. J'ai alors pris la paire de jumelles de Farris et je me suis aperçu qu'il portait des bottes Allemandes, et non nos brodequins réglementaires ! J'ai lancé au sergent : C'est un Allemand ! il porte notre uniforme mais c'est un Allemand, ses bottes sont Allemandes !... Farris épaula son USM1. une détonation éclata, nous vîmes le soldat s'écrouler à quelques dizaines de mètres de nous. Plus au loin, dans les fourrés des mouvements étaient visibles, comme un groupe battant en retraite. Nous venions de déjouer une nouvelle attaque... Si elle avait réussi, les canons de 57 qui nous restaient encore auraient été détruits et dès lors, nous n'aurions pu nous opposer à une autre offensive, c'était fini pour nous.

Le courage du bataillon perdu et des troupes de la 30e DI avait fait pencher la balance en faveur des alliés.Le 12 août 1944 fut jour de délivrance. Les cloches des églises encore debout pouvaient alors se mettre à sonner. Le 120e, à bout de forces était relevé par le 320e RI (35e D.I.US). On retira 574 corps de la colline 314 et de ses abords. Le régiment avait subi de lourdes pertes, mais il avait tenu bon... Les blessés et les rescapés durent leur salut à leur courage et aux provisions que les neuf civils Normands partagèrent avec eux tout au long du siège. La contre attaque de Von Kluge venait d'échouer, Avranches n'avait plus aucune chance d'être atteint. La Old Hickory Division venait de sceller le destin de la 7e Armée Allemande. Le département de la Manche était maintenant totalement libéré. Il pouvait savourer la Liberté retrouvée et reconstruire un patrimoine en grande partie détruit lors des affrontements.

Pour Kelly, la guerre continue.
"J'ai participé à la fermeture de la poche de Falaise avec la Old Hickory, puis ce fut la bataille des Ardennes. La campagne de France pris fin pour moi en Allemagne, le 17 novembre 1944 ou je fus gravement blessé. J'ai alors été rapatrié en Angleterre, ou je restai 67 jours en convalescence avant d'être de nouveau affecté en France, à Langres (52) au sein de la 1230th Labor Supervision Company. J'y suis resté jusqu'en octobre 1945 avant d'être embarqué pour New-York avec mes camarades. Tout au long de la traversée, je n'ai eu qu'une idée en tête : embrasser la première femme que je verrai ; c'était une manière d'exprimer ma joie d'être toujours vivant, après ce que j'avais vécu en Europe.... C'est ce que j'ai fait. Je suis allé au devant de la première femme que j'ai vu, je lui simplement dit que j'avais combattu en Normandie, que j'étais heureux d'être encore en vie et que je souhaitais l'embrasser... Elle m'a elle regardé, droit dans les yeux, et m'a dit d'une voix calme :" Alors, me voici !...". C'était le 11 novembre 1945, au port de New-York.

Kelly Lynch est revenu en Normandie, il y a un an, ce pour la première fois depuis 1944. Il était accompagné de sa famille et a retrouvé une région qui restera à jamais dans son coeur et sa mémoire : "Toute ma vie, je serai heureux et fier d'avoir combattu en Normandie. Si c'était à refaire, je le referais sans hésiter".

TEMOIGNAGES Huiaumilieudesmontagnesdutenne Kelly LYNCH aujourd''hui au milieu des montagnes du Tennessee

Propos recueillis en septembre 2001


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TEMOIGNAGES Empty Témoignages du vétérans D. Zane Schlemmer

Message  Bobabs Lun 20 Fév - 10:22

Témoignages du vétérans du Jour J, D. Zane Schlemmer


TEMOIGNAGES Insignedela82ndairbornedivisio Insigne de la 82nd airborne division

D. Zane Schlemmer est né le 13 octobre 1924 à Canton dans l'Ohio (USA). Il s'est engagé quelques jours après son dix-huitième anniversaire, en 1942, dans l'Airborne : les troupes aéroportées américaines. Il a rejoint les parachutistes pour diverses raisons, mais plus particulièrement pour se prouver de quoi il était capable, pour les 50 Dollars par mois qu'il allait y gagner, parce qu'il était attiré par la paire de chaussures de sauts uniquement offerte aux parachutistes et par l'insigne des troupes aéroportées, la célèbre "Jump Wing".

D'origine allemande, Zane Schlemmer voulait également "remmettre les choses à leur place" et montrer sa loyauté envers son pays.
Après avoir effectué ses classes et ayant participé à de nombreux exercices et manoeuvres aux Etats-Unis, Zane Schlemmer est envoyé par bateau en Irlande du Nord où il débarquera en janvier 1944 et il a rejoint Nottingham, Angleterre, le jour de la Saint Patrick (17 mars), où il a retrouvé une grande partie des effectifs de la 82ème Division Aéroportée.

"Le Jour J, j'étais un Sergent de 19 ans appartenant à la Compagnie du Quartier Général, Second Bataillon du 508ème Régiment d'Infanterie Parachutiste, 82ème Division Aéroportée. J'étais un observateur avancé d'une section de mortier de 81 mm. Voici mon histoire, mon D-Day."

"A Nottingham, en Angleterre, nous avons installé notre camp - qui sera utilisé comme point de départ pour l'Opération Overlord en Normandie et l'Opération Market-Garden en Hollande - et bien qu'il faisait froid, nous étions confortablement installés. Nous garderons toujours un agréable souvenir de Nottingham et de ses habitants.
Chez les parachutistes, nous étions tous des volontaires, aussi bien les officiers généraux que les simples soldats, et nous étions parachutés toujours ensemble, chacun ressentait la même sensation. Sur le terrain, il régnait un sentiment de camaraderie et de respect mutuel entre tous, même envers les officiers, qui pour la plupart étaient des "West Pointers" (de "West Point", nom de la très célèbre école américaine formant les officiers de l'Armée de Terre).
Nous avons passé les mois précédents l'invasion en Angleterre, poursuivant nos entraînements. Il s'agissait la plupart du temps de sauts, puis d'actions de regroupement et de défense au sommet d'une colline. Pendant toute la durée des entraînements, nous nous sommes à de nombreuses reprises demandés quel serait le pays au-dessus duquel nous serions parachutés. Toutes les rumeurs donnaient des points de chute probables allant de la Norvège aux montagnes des Pyrénées. Nous étions tous impatients d'effectuer notre première mission.
Au début du mois de juin 1944, nous sommes montés à bord d'anciens bus Anglais avec tout notre équipement, et nous avons été transporté jusqu'à nos aérodromes respectifs. Notre bataillon s'est rassemblé à l'aérodrome situé à Saltby, enfermé par des fils de fer barbelés de sécurité. Nous avons été ensuite ravitaillés en munitions.
A ce moment, j'étais, et tant qu'observateur avancé d'une section de mortiers, armé d'un fusil M-1 Garand de 7,62 mm. Nous avions été informés que les troupes allemandes éléminaient en priorité les observateur avancés. Ainsi, armé d'un fusil et portant mes jumelles dans une sacoche située à l'arrière de mon ceinturon, j'essayais d'être le plus discret possible quant à mon véritable rôle.
Nous avons également reçu des munitions pour nos mortiers ainsi que diverses pièces pour leur utilisation. En plus de deux grenades (l'une à fragmentation et l'autre incendiaire), nous avons tous reçu une grenade Gammon. La Gammon était une invention Anglaise. Il s'agit d'un explosif composé de près de 1000 grammes de C-2 (plastic) entouré de coton. Le détonateur est une simple mèche à faire brûler. Ces explosifs étaient pratiques pour détruire des véhicules et nous les avons appelés "l'artillerie de main". La grenade Gammon était également très appréciée, parce qu'une fine part de plastic C-2, une fois au contact d'une allumette, brûle extrêmement rapidement, procurant une source de chaleur intense et sans fumée, et cela nous servait pour préparer le café et nos rations K au fond de nos trous de souris. Ainsi en Normandie, la taille de nos grenades Gammon se réduisait de jour en jour.
Chaque soldat avait également été doté d'une mine anti-char que nous devions transporter sur le terrain.
Ce que j'ai trouvé de très étonnant était que chaque parachutiste demandait à recevoir plus de munitions, malgré le fait que nous étions très lourdement chargés. Chacun voulait disposer d'une puissance de feu potentielle plutôt que de dépendre du ravitaillement.
Puis nous avons attendu, tuant le temps en effectuant des vérifications de nos équipements, nettoyant et re-nettoyant nos armes, aiguisant encore et toujours nos couteaux, vérifiant nos équipements téléphoniques ainsi que les sacs où étaient disposés nos munitions qui seront largués en même temps que nous. Nous avons ensuite accroché des petites lumières à ces sacs pour les récupérer après avoir touché terre, étant donné que le saut s'effectuerait de nuit. Puis nous avons été "briefés", assis sur des bancs. On nous a indiqué que notre objectif - une colline que nous devions capturer - était occupée depuis peu par des troupes allemandes, et que nos ordres avaient en conséquence changé. On nous a également informé que nous devions sauter sans se soucier de quoi que ce soit et qu'il était interdit de rester dans l'avion pour rentrer en Angleterre.

La première séance du briefing était accompagnée de cartes muettes, montrant simplement des champs, des routes, des rivières, des ponts et des villages. La deuxième séance du briefing était cette fois-ci accompagnée de cartes portant des noms de villages anglicisés : Evansville (qui devait dans la troisième séance de briefing devenir Etienville), Port Abbey (Pont-L'Abbé) et Pickleville (Picauville). Lors de cette troisième et dernière séance de briefing, nous avons été informé que la zone de parachutage est située en Normandie, France, et que notre objectif principal était d'empêcher les soldats allemands d'emprunter les routes qui mènent à la plage d'invasion dénommée Utah ; notre mission ressemblait à une tactique de football américain : le "field blocking". On nous a ensuite dit que nous devions tenir nos positions jusqu'à ce que nous soyons relevés par les troupes débarquées, et que par la suite nous serions évacués de la péninsule du Cotentin.
On nous a, par la suite remis une série d'objets supplémentaires comme une mini-carte d'évasion et un minuscule compas que nous devions insérer à l'intérieur de nos vestes de saut. On nous a également donné la "monnaie d'invasion" : plusieurs billets en Francs, afin que nous puissions nous ravitailler auprès de la population Française. Nous avons encore tous reçu deux tablettes de Benzedrine (amphétamines), pour nous aider à rester éveillés, ainsi que deux seringues de morphine à s'administrer soi-même au cas où nous sommes blessés. Je n'avais, bien entendu, jamais entendu parler de tablettes de Benzedrine ou de seringues de morphine.
On nous a également remis un petit jouet appelé "criquet", qui servait comme identificateur et pour communiquer une fois en territoire ennemi, dans la pénombre. A un "clic" devait correspondre deux "clic".
Nous avons ensuite revêtu nos gilets de sauvetage jaunes. Nos fusils M-1 étaient démontés et les divers éléments étaient placés dans une sacoche pour vêtements que nous appelions habituellement "boîte à violon". Le conteneur était ensuite placé sous notre parachute de réserve, et ainsi nous ne pouvions réellement nous défendre qu'une fois notre parachute et les harnais détachés, et notre arme remontée. C'est pour cette raison que j'avais emporté un petit revolver à barillet Smith & Wesson, que je portais juste sous le parachute de réserve et sous le gilet de sauvetage jaune, au cas où j'en avais besoin au moment de l'atterrissage.

Le Jour J était dans un premier temps prévu pour le 5 juin 1944, mais les mauvaises conditions climatiques ont retardé l'invasion de 24 heures. Finalement, aux alentours de 20 heures 30, le lundi 5 juin 1944, notre stick s'est rassemblé. Mon stick comptait 18 parachutistes et nous avons traversé l'aérodrome en direction de l'avion qui devait nous transporter. Devant le Douglas C-47, nous avons pour la dernière fois vérifié nos équipements. Nous étions presque parés et il nous était impossible de se détendre, tellement nous étions chargés.
Ce soldat américain de la 82ème Airbone embarque avec plus de 40 kilos d'équipement à bord d'un C-47.

Nous avons ensuite noircis nos visages, endossés nos parachutes (principal et de réserve), puis nous avons enfilés nos gilets de sauvetage, mis nos casques sur la tête et nous avons accrochés nos jugulaires. Nous avons été ensuite poussés et hissés à l'intérieur de l'avion par les membres d'équipage, car nous étions tellement chargés qu'il nous était impossible de grimper par nous-même à l'intérieur de l'appareil.
Les visages des soldats exprimaient tous quelque chose de différent : une nécessité nerveuse de discuter, de rire, un recueillement pour prier. Toutes les petites différences entres les hommes étaient oubliées et l'esprit de camaraderie primait avant tout. Je me souviens avoir mâché un paquet entier de chewing gum pendant l'embarquement et depuis ce moment je n'ai pas le moindre souvenir de ce qui est arrivé à cet amas de gomme. Ou bien je l'ai avalé, ou bien je l'ai perdu pendant le parachutage.

Notre avion était un C-53, ayant une porte de sortie relativement plus petite que celle du C-47 standard, mais il n'y a finalement pas eu de problème.
J'ai souvent pensé aux ingénieurs qui avaient dessiné les sièges dans des avions de transport de troupe qui n'étaient absolument pas compatibles pour des soldats parachutistes et leur équipement. La plupart d'entre nous ont préféré s'assoire sur le sol plutôt que sur les sièges qui n'étaient pas pratiques.
Le pilote et les membres d'équipage nous ont demandé que nous nous fourrions le plus possible à l'avant de l'appareil afin de permettre un décollage le plus rapide possible. Nous avons remarqué que chaque avion et planeur Allié avait trois bandes blanches peintes sur chaque aile pour faciliter l'identification. On nous a dit que tous les appareils qui seraient repérés sans ces signes distinctifs devaient être abattu. Puis, au crépuscule naissant qui emplissait petit à petit l'aérodrome dans la pénombre, les moteurs des avions ce sont mis en route. Ils ont commencé à toussoter, cracher et malgré quelques sursauts, le bruit s'est stabilisé pour augmenter peu à peu en intensité.
Alors que les moteurs atteignaient la pleine puissance, il semblait que chaque rivet isolé vibrait en harmonie avec le bruit produit par la mécanique de l'appareil, puis les avions ont pris la direction des airs. Pendant que nous décollions, nous pouvions voir les membres du personnel de l'aérodrome qui agitaient leur bérets et casquettes dans notre direction, eux qui, comme nous, savaient que le Jour J tant attendu venait tout juste de commencer.
Le 6 juin 1944, à 0 heure et 1 minute (heure anglaise), nous approchions de la Manche. Comme l'appareil ne disposait pas de porte, la cabine était agréablement rafraîchie par le courant d'air. Je l'ai déjà mentionné, notre stick était formé de 18 parachutistes. Le Lieutenant Talbert Smith, un de nos officiers, était le chef du stick et moi, en tant que Sergent, je devais sauter en dernier.
Quand nous avons atteint la Manche, il faisait de plus en plus sombre, mais nous pouvions remarquer que la mer était recouverte d'embarcations. Il était visible que lorsque nous étions au-dessus de la Manche, nos mines ont arrêté d'exprimer une relative tranquillité et le stick est devenu très calme et même pensif. Avec le recul, on comprend que ce changement était dû à l'apréhension du saut et du baptême du feu.
Les seules lumières que je voyais étaient les lueurs des cigarettes. Depuis l'endroit où je me trouvais, tout juste à proximité du cockpit, je pouvais voir en me levant, derrière le pilote, l'aile bleutée des formations d'avions qui nous précédait.
Après avoir volé au-dessus de la Manche pendant un certain temps, nous avons effectué un virage sur la gauche, et j'ai remarqué deux petites îles isolées dans cette direction. Je devais apprendre plus tard qu'il s'agissait des îles Anglo-Normandes, situées au large des côtes françaises. Bientôt, notre avion a survolé le rivage français et, bien qu'il n'y avait pas beaucoup de visibilité, on pouvait tout de même distinguer les routes, les champs, quelques petites maisons, le tout nous apparaissant principalement d'une couleur brunâtre.
Nous nous sommes ensuite levés, nous avons accrochés nos parachutes au câble tendu au-dessus de nous et nous avons vérifiés nos équipements dans le but de nous préparer à sauter, et que tous les problèmes soient évités. La lumière rouge s'est allumée. Ensuite, soudainement, sans avertissement préalable, notre avion a traversé un nuage ou un brouillard très dense. Ceci nous concernait véritablement, parce que nous ne pouvions voir en dehors de l'avion qu'une masse blanche, et il nous était même impossible de voir les lumières situées aux extrémités des ailes. Ceci, bien entendu, a handicapé les pilotes et beaucoup d'appareils ont rompu leurs formations, dans le but d'éviter toute collision avec un autre avion.
Pour nous autres, debout dans la cabine, le temps semblait sans fin et nous allions d'un nuage à un autre, jusqu'à ce que nous quittions d'un seul coup la masse nuageuse. C'est à cet instant que nous avons fait l'expérience de la FLAK (artillerie anti-aérienne allemande) et des armes de poing dont les projectiles, lorsqu'ils heurtaient l'avion, émettaient un bruit similaire à du gravier s'écrasant sur une tôle en métal (c'était un son assez impressionnant et une fois qu'on l'entend, on s'en souvient pour toujours).

.../... Asuivre


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Message  Bobabs Lun 20 Fév - 10:25

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Témoignages du vétérans du Jour J, D. Zane Schlemmer

Nous avons continué de vérifier nos équipements. Le stick de paras s'est ensuite rapproché de la porte de sortie le plus rapidement possible, attendant que la lumière verte s'allume alors que les tirs de la FLAK se poursuivaient.
A ce moment, je ne pensais plus qu'à deux choses : premièrement je voulais sortir de l'avion le plus rapidement possible, puisque j'étais le dernier du groupe à sauter, et deuxièmement je me demandais ce que je fichais dans une telle situation (je me suis posé la même question à de nombreuses reprises les jours qui ont suivi).
En règle générale, en fonction de l'habitude et de son instinct, un parachutiste parvient à anticiper la lumière verte de saut, quand le pilote ralenti la vitesse de son appareil et perd de l'altitude, mais pas cette nuit-là. La lumière verte s'est allumée, et tout le stick est sorti de l'avion de manière parfaite - cela ressemblait presque à une chorégraphie -.
J'ai véritablement ressenti l'ouverture de mon parachute comme un choc violent, mais également en tant qu'une sensation agréable. Mon casque s'était placé devant mon visage et j'ai du le replacer pour voir à nouveau.

Le ciel semblait être animé par des couleurs roses, oranges, et par des balles traçantes rouges qui se courbaient avec élégance, puis qui se séparaient en de petits traits après avoir traversé la voile du parachute.
Je me suis depuis demandé qu'elle était la fréquence de balles traçantes par rapport aux balles ordinaires utilisée par l'Armée allemande cette nuit-là, car la vue de ces "tracers" m'a fortement impressionnée. Au loin, vers l'Est (c'était la direction empruntée par les avions Alliés), je pouvais apercevoir un feu très important au sol - cela devait se passer à Sainte– Mère-Eglise, bien que je ne le savais pas encore à l'époque -.
Le côté embarrassant du saut de nuit est que vous ne pouvez voir le sol s'approcher et que vous devez en conséquence anticiper votre atterrissage. Nous avons été parachuté à une altitude extrêmement faible, afin de minimiser le temps de chute dans les airs où, sans défense, nous étions des cibles faciles, et j'ai atterri contre une haie bordant un verger, tout en émettant un bruit sourd provenant de mon équipement que je portais le long de mon corps. Je me suis rapidement défait de mes harnais, j'ai assemblé les diverses parties de mon fusil, et j'ai empoigné mon revolver.

La lune, à ce moment, était cachée derrière des nuages et cette faible lumière, qui était quelque peu rosée dans le ciel à cause des balles traçantes, m'a permit de remarquer un petit chemin le long du verger et une petite maison au toit formé par des tuiles. La FLAK et les armes de poing ouvraient alors le feu sur la vague suivante d'avions parachuteurs, qui arrivait au loin.
Je n'ai observé aucun signe de vie, ni dans le verger, ni à l'intérieur de la maisonnette. Mais, près du chemin en direction de l'Ouest, à proximité d'un groupe d'habitation, devait se trouver un point fortifié allemand, où les tirs étaient très importants.
Je n'avais aucun moyen de retrouver les autres parachutistes de mon stick. Je devais apprendre plus tard que le Lieutenant Talbert Smith, qui a sauté en premier, a été immédiatement capturé, fait prisonnier. Il a été tué par la suite lors d'une attaque en rase - motte d'un avion américain.
Alors que je quittais le verger pour rejoindre le petit chemin de campagne, une énorme boule de feu orange est apparue au-dessus de ma tête, descendant rapidement en direction de l'Est. Cela ressemblait beaucoup à la chute d'une météore ou d'une météorite. Mais le tout était accompagné par le gémissement de deux moteurs à pleine puissance qui s'emballaient, apparemment un avion transporteur de troupe qui allait s'écraser, et mes premières pensées furent pour les soldats et les membres d'équipage qui devaient sûrement être encore tous à bord.

J'ai trouvé cela étrange le fait de ne pas avoir entendu cette masse enflammée s'écraser contre le sol, mais quoi qu'il en soit, plus tard, au moment où la lumière du Jour J éclairait les alentours, j'ai vu l'épave informe et enflammée d'un C-47 dans un marais de la rivière Merderet. Je n'ai jamais vraiment su s'il s'agissait bien de l'avion touché que j'avais vu piquer.
Trois éléments ne nous avaient pas été communiqué, et nous nous en sommes très vite aperçu. Premièrement, la zone où j'avais été parachuté était occupée par les Allemands de la 91ème Division, qui était relativement redoutée. Le poste de commandement de la division était situé au bord de notre "drop zone" (point de chute), et il semblait que les Allemands occupaient toutes les grandes fermes françaises de la partie Ouest de la rivière Merderet.
Deuxièmement, personne ne nous avait informé de la taille des immenses haies françaises. Nous avions été, bien entendu, prévenu que la région était parsemée de parcelles entourées par des haies, et nous nous étions fait à l'idée qu'il s'agissait d'une végétation identique à celle rencontrée en Angleterre, sachant les chasseurs à cour pouvaient facilement passer au-dessus des haies britanniques.
Troisièmement, personne ne nous avait prévenu que les terres à proximité de la rivière Merderet ou encore de la rivière Douve étaient inondées. Au lieu de ça, on nous avait parlé d'un simple parterre humide identique à ceux que l'on peut trouver sur la plupart des fleuves et courts d'eau. Ces marais étaient comme des lacs peu profonds qui s'étendaient sur de longues distances.
Nous devions apprendre plus tard que les Allemands avaient eux-même inondé les vallées bordant les rivières, dans le but de prévenir toute attaque de type aéroportée. Les marais étaient en général trop profonds pour les traverser, et des fossés de drainage empêchaient l'eau de s'écouler. L'eau des marais était ainsi assez sale, on ne pouvait pas voir le fond qui était boueux, et, par la présence de grandes mauvaises herbes qui poussait dans cette zone, il était très difficile voire impossible de traverser ces marais.

J'étais seul et je n'avais pas la moindre idée de l'endroit dans lequel je me trouvais, à part d'être en France. Il ne m'était pas possible de rejoindre mon groupe, parce que les Allemands occupaient les bâtiments d'une ferme situés à proximité du chemin. J'ai alors rapidement déposé la mine anti-char que je portais sur le petit chemin de campagne, je l'ai camouflé derrière des branchages, puis je l'ai armé avant de partir vers le Sud afin de flanquer le point fortifié allemand.

Près du verger suivant, j'ai rencontré un sergent de la 101ème Airborne Division, qui apparaissait autant déconcerté que moi d'être là où il se trouvait. Nous étions tout deux bien loin de nos objectifs respectifs. Nous avons ensuite entendu des tirs d'armes de poing en direction du Sud et je me suis dit qu'il devait y avoir d'autres paras comme nous parmi ceux qui tiraient, alors nous avons emprunté une route orientée Est-Ouest.
Au fond du fossé situé le long de cette route, nous avons trouvé deux câbles parallèles. Il s'agissait apparemment de câbles militaires de communication, et nous les avons ainsi coupés, avant de reprendre notre marche et de couper les câbles à nouveau une centaine de mètres plus loin, et nous avons jeté la partie détachée derrière une haie afin qu'elle ne soit pas réutilisée.
Au-devant de nous, on pouvait voir qu'un virage se dessinait, et qu'au-delà de ce virage, le chemin rejoignait une route plus importante qui traversait les marais. Une grande maison était à proximité, derrière un groupe d'arbres d'où provenaient la plupart des tirs. Il s'agissait à première vue d'un autre point fortifié allemand, alors nous avons poursuivi notre progression le long de la route. Nous sommes arrivés près d'un petit pont maçonné, de quelques maisons situées le long de la route et nous avons finalement atteint une intersection de chemins de fer. Je me suis alors souvenu que le seul village dans notre zone disposant d'un réseau de chemin de fer était appelé Chef du Pont.

Le pont, le village, le chemin de fer... Je pouvais enfin visualiser ce qu'on nous avait dit lors du briefing de la veille. En m'orientant, je suis parvenu à repérer que j'avais atterri à environ 2 ou 2,5 kilomètres au Sud - Est de mon point de chute initialement prévu (ce qui était plutôt chanceux, comparé à d'autres parachutistes) et que j'étais à présent sur la mauvaise rive de la rivière Merderet.

Le sergent de la 101ème Airborne décida de continuer la progression en direction de sa zone de parachutage, située au Sud-Est mais moi, sachant que j'étais du mauvais côté de la rivière Merderet, je l'ai laissé et j'ai voulu retraverser le petit pont. A ce moment, les tirs allemands dans ma direction se multipliaient depuis cette grande maison, qui était un château, et j'étais obligé de trouver un autre passage au-dessus de la zone inondée, ce que je fis, au Nord de la route principale. Il y avait des tirs sporadiques d'armes automatiques dans toutes les directions, mais je n'étais pas capable de savoir s'il s'agissait d'amis ou d'ennemis.

Alors que j'atteignais le bord des terrains inondés, j'ai entendu un planeur s'écraser contre de grands arbres bordant un champ à quelque distance de ma position. On nous avait informé que de nombreux planeurs, transportant chacun un petit bulldozer, devaient atterrir avant l'aube afin de préparer les terrains d'atterrissage pour les autres planeurs. Le bruit de cet engin heurtant les arbres était comme celui provoqué par des milliers d'allumettes que l'on allumerait en les grattant d'un seul coup et je pensais à ce pauvre pilote de planeur avec un petit bulldozer derrière lui.

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Message  Bobabs Lun 20 Fév - 10:26

.../... SUITE

Témoignages du vétérans du Jour J, D. Zane Schlemmer

J'ai soudainement eu froid et je tremblais. Soit en raison de l'humidité des marais et de la fraîcheur de la nuit, soit à cause de la peur que j'avais à ce moment, je ne le savais pas exactement. Rapidement après, en utilisant le criquet, j'ai rejoint un groupe de trois autres personnes. L'un d'entre eux était déjà blessé, un autre avait la jambe cassé à cause de son saut, ainsi nous leur avons apporté une assistance médicale et nous les avons installé dans le fossé d'une route, sous une imposante haie, et je suis reparti avec le troisième soldat.
A l'aube, nous avons quitté la route et les petits chemins, et nous avons poursuivi notre progression à travers les champs, comme on nous l'avait indiqué lors de l'instruction. En effet, nous devions nous tenir à distance des routes et des habitations à causes des actions de l'artillerie. Ainsi, on concendant ces zones aux allemands, nous pouvions mieux contrôler le champ de bataille, en attaquant à la manière des Indiens d'Amérique lors de la Conquête de l'Ouest. Ainsi, durant tous jours passés en Normandie, je n'ai pas une seule fois été à l'intérieur d'une ferme ou d'un bâtiment, sauf après avoir reçu ma blessure quelques temps plus tard, quand l'on m'a transporté dans un bâtiment à l'arrière transformé en un hôpital de campagne.

Nous avons rencontré d'autres parachutistes dans différents champs qui préparaient des embuscades contre les troupes allemandes sur les routes et les chemins de campagne. Ces champs devenaient de véritables champs de bataille isolés les uns des autres. Avant d'entrer dans un verger, il fallait l'examiner à travers les haies. S'il s'y trouvaient des vaches, nous étions rassurés parce qu'elles étaient d'excellentes indicatrices, car elles assimilaient les personnes avec la traîte et se tenaient en face du premier individu repéré en attendant le début de la traîte. Depuis toutes ces années, j'ai garder une place dans mon coeur pour ces magnifiques vaches normandes, avec leurs grands yeux et leurs grosses mamelles.

Nous étions très habitué au bruit que faisaient les bottes allemandes en claquant sur les pavés des routes normandes, alors que nos bottes de parachutistes étaient en caoutchouc, et faisaient un son très différent. Ainsi, nous étions capables d'attaquer par surprise de très nombreuses patrouilles ennemies et de plus, nous étions avantagés par les haies qui nous camouflaient, étant bien trop larges et trop fournies pour voir au travers. Nous avons très vite appris à reconnaître les différentes armes utilisées par les soldats allemands, simplement en entendant la cadence de tir et le bruit qu'elles faisaient.

Aux alentours de dix heures du matin le Jour J, des dizaines de parachutistes nous avaient rejoint, certains d'entre eux étaient blessés, mais nous ne disposions d'aucun mortier, de très peu de mitrailleuses lourdes, quelques bazookas, quelques radios, un peu de matériel médical (excepté ceux portés par chaque parachutiste), quelques médecins pour donner les premiers soins aux blessés, et pourtant, nous avions tous nos propres armes et celles prises aux camarades touchés

Nous nous préparions tous à attaquer notre objectif principal, Etienville, à quelques kilomètres pourtant mais rien d'infranchissable. Finalement, nous avons reçu un message de notre colonel nous informant que nous devions nous casser au plus vite et rejoindre le périmètre de la cote 30, qui surplombait les marais que j'avais traversé ce matin dans la pénombre.

Nous avons alors pris la direction de la colline qui contrôlait théoriquement deux routes traversant la rivière Merderet. Toutefois, ces points stratégiques étaient camouflés par de nombreuses haies et des vergers de pommiers. J'ai été assigné à un avant-poste sur la cote 30, où j'ai passé la plupart partie des quatre jours et nuits suivant, en compagnie du groupe commandé par le Lieutenant-Colonel Thomas Shanley.

J'ai apprécié cette position d'avant-poste, bien que parfois les tirs provenaient de plusieurs directions différentes, parce qu'à l'arrière les blessés et les mourrants étaient nombreux et qu'il n'y avait aucune moyen de les évacuer. Il était très difficile d'entendre leurs cris et leurs gémissements, d'autant plus que nous n'avions plus aucun matériel médical. Nous n'avons pas non plus été ravitaillés en munition, équipement, eau ou nourriture, mais nous pouvions faire sans, bien que le manque de plasma et d'autres ressources médicales se soit fait sentir.

Plusieurs parachutistes se sont portés volontaires pour patauger et nager à travers les marais afin de rapporter du plasma et du ravitaillement pour le service de santé.

Nous étions alors exténués, jusqu'à ce que, quelques jours plus tard, nous ayons eu la possibilité de contacter par radio une batterie d'artillerie de canons de 75 mm. Le barrage d'artillerie a mis fin à de nombreuses attaques allemandes alors que notre situation aux avants-postes était parfois extrêmement critique.

Après avoir ouvert le feu pour contrer une offensive allemande provenant d'un petit chemin situé à proximité des avants-postes, nous avons capturé et ramenés deux petits canons d'artillerie allemands ainsi que des munitions. Nous les avons tirés à l'arrière de la cote 30 pour qu'ils soient réutilisés lors d'une prochaine attaque.

Le 6 juin 1944, à 11 heures 59, mon corps devenait très las, mais j'étais actif mentalement (probablement grâce à la Benzedrine), luxueusement emmitouflé dans un parachute qui tenait très très chaud dans mon trou de souris. Nous ne pouvions pas savoir si le débarquement sur les plages avait ou non réussit, mais nous savions que nous pouvions tenir au moins cinq jours contre les attaque allemandes. Pendant ces journées d'attente des renforts, j'ai beaucoup mûri et seul un soldat confronté à ce genre de situation pourra comprendre.

Je dois aussi mentionner que pendant la matinée du Jour J, nous avons appris la mort de notre aumônier catholique qui avait sauté avec nous et qui a été tué par des grenades allemandes alors qu'il était auprès de nos blessés. Nous nous sommes jurés de venger sa mort sans porter attention aux lois de la guerre.

Nous avons poursuivi le combat en Normandie pendant encore un mois, jusqu'à ce que je sois blessé par les tirs de l'artillerie américaine qui visait un flanc de la cote 131, une fortification importante au-dessus de la ville française de La-Haye-du-Puits. Le 4 juillet 1944, j'ai été embarqué à bord d'un LST (Landing Ship, Tank) hôpital, qui m'a transporté jusqu'en Angleterre où je me suis retrouvé dans un hôpital de campagne Britannique.

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Message  Bobabs Lun 20 Fév - 10:26

.../... SUITE ET FIN

Ils ont du arracher mon uniforme, couvert de saletés et de sang, que j'avais porté sans prendre un seul bain pendant 29 jours. J'ai insisté pour conserver mes bottes de saut pendant qu'on opérait mes blessures, car elles représentaient ce que j'avais de plus précieux dans cet endroit.

J'ai été émerveillé par le luxe impressionnant de la Marine américaine, avec ses sièges propres, ses feuilles blanches, ses pêches en conserve, son pain blanc, ses jus de fruit et son véritable café - j'avais oublié toutes ces choses et elle me paraissaient presque étranges, après avoir vécu ces journées difficiles à travers les haies normandes.

Notre régiment a été retiré du front le 8 juillet 1944 et sur le 2055 parachutistes du 508ème Régiment d'Infanterie Parachutiste qui ont sauté au-dessus de la France, le 6 juin 1944, seulement 918 d'entre-eux ont été reconduit à bord de LST à Nottingham, en Angleterre, pour y reformer le régiment, combler les places vides, et préparer le prochain saut en parachute. Les autres soldats ont été tués, blessés ou sont portés disparus. Pourtant, beaucoup d'entre nous ont pu rejoindre plus tard le régiment. J'ai eu de la chance de n'être que superficiellement blessé et de pouvoir de l'hôpital tout juste à temps pour sauter au-dessus de la Hollande, le 17 septembre 1944, en compagnie de ma propre section, bien que mon bras était toujours bandé et que je sentais encore lesautres blessures reçues en Normandie.

Pendant de nombreuses années après avoir quitté l'Armée en novembre 1945, j'ai essayé d'oublier tous mes souvenirs de ces journées et mois fatidiques, mais ils revenaient périodiquement en mémoire. Dans les années 70, j'ai soudainement réalisé que ces années faisaient partie de moi, qu'elles appartenaient à l'Histoire et que rien ne pourrait modifier ces souvenirs.

En 1974, je suis retourné en Normandie et en Europe pour retrouver ces fermes, ces champs, ces forêts et ces villes que j'avais observé dans des conditions si différentes les années précédentes. Après quelques recherches, j'ai retrouvé le verger de pommiers où j'avais atterri le Jour J. J'ai rencontré les villageois normands qui habitaient dans cette région à ce moment et qui m'ont invité dans leur maison, avec le sentiment dans le coeur qu'ils n'oublieraient jamais les instants magiques de leur libération.

Mais avant tout, je me suis trouvé en paix avec moi-même et j'ai découvert avec surprise qu'en effet, tous les parachutistes peuvent pleurer.

En 1977, la très agréable population de Picauville, en Normandie, a installée une plaque à proximité du verger où j'ai atterri, et m'a honorée en renommant la rue adjacente "Rue Zane Schlemmer". Le fermier Pierre Cotelle, qui avait pendant des années réuni une collection de matériels divers de la Seconde Guerre Mondiale, a appelé sa collection : "Musée Zane Schlemmer". Et tout ça, parce qu'une nuit, bien des années auparavant, un jeune parachutiste américain est venu leur donner la même chose qu'un général français, Lafayette, auquel nous devons beaucoup de respect (il avait aidé notre armée révolutionnaire), nous avais donné il y a bien longtemps : la Liberté.

Zane Schlemmer

TEMOIGNAGES Insignedu508rgimentdela82airbo Insigne du 508é régiment de la 82 é airborne.The Red Devils


Dernière édition par le Ven 31 Mar - 9:30, édité 1 fois
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Message  Bobabs Lun 20 Fév - 10:27

PRISE DU BUNKER DU RUQUET PAR LA 467e COMPAGNIE DE LA 29e DIVISION LE 6 JUIN 1944

Interview de 5 vétérans sur le site d'Omaha le 5 juin 1994
menée par Andrew Minchin et traduite par Paul Boyer,
Voir les photos

Andew s'adresse aux vétérans sur les lieux mêmes du coup de main ayant permis de neutraliser l'un des bunkers, ici celui du Ruquet, qui transforma pendant de longues heures la plage de St Laurent en "champ de tirs": Omaha Beach la sanglante. Il leur propose de répartir cet entretien en 3 parties distinctes :

La 1 ère partie : le débarquement du 6 Juin 44.
La 2e partie concernera la chronologie des événements après avoir quitté La plage,
La 3e sera consacrée à la fin de la guerre et au» conditions de réinsertion des uns et des autres aux Etats-Unis.
Enfin, l'interview se terminera par un message que chacun délivrera aux enfants des écoles, actuelles et à venir.

Tous avaient le grade de sergent. Leur nom s'inscrit dans nos mémoires :

- Henry AYALA vit actuellement en Californie
- Dalmoin ESTES est dans l'Illinois
- Hymon HAS vit à Bronx dans l'état de New-York
- Thomas MACDONNELL est député dans l'état du Missouri
- Orv MONSON habite dans l'état de Washington

Débarquement de la 2éme vague 8 h OO du matin

Sergent MacDonnell (appelé par ses camarades "le docteur")

Avant de commencer, je voudrais éclaircir un point : Henry et moi étions sur cette sortie de plage codée °E3" et nous appartenions à la 2e section. Ces messieurs étaient à la "ET. Ils étaient de la 1ère section du 467e attaché ou 11 6e régiment de combat de division d'infanterie. Henry et moi étions donc de la 2e section, de la batterie A mais attaché au 16e régiment de la 1ère division. Nous dépendions tous de la 29éme division.

Tous: sur ce lieu nos histoires sont toutes différentes.

Sergent Mc Donnell

Dans la 467e il y avait des hommes du génie, les soldats d'infanterie, des chasseurs aériens et nous avons été les premiers artilleurs sur la plage car l'artillerie de soutien avait sombré par 12 pieds d'eau (3m5). Henry était sergent dans le 1er half-track, moi j'étais artilleur (PFC) dans le 2e half-track. Les 3 autres étaient sur des M16, 37mm. Le sergent Has vous racontera leur histoire. Voici ce qui nous est arrivé, nous.

Notre bateau a failli couler après avoir heurté une mine. Les premiers hommes à s'élancer furent tués, le chef à bord a été blessé, nous avons rapidement déchargé les 4 half-track dont Henry et moi avions la charge. Avec la mitrailleuse de calibre 50m/m, nous avons commencé à tirer sur la falaise, le half-track de Henry a été touché par un mortier, celui qui était derrière moi aussi, tous les hommes sur ces 2 half-track ont été tués ou blessés, Henry a été blessé. Les hommes de mon half-track et du 4e half -track ont couru vers les dunes, un des hommes du 4e half-track a été atteint par des balles traçantes et le reste d'entre nous est parvenu sur les dunes un par un. Alors nous avons progressé vers une position sûre. Alors nous avons alors commencé è avancer avec nos fusils, nos grenades et lance-grenades pour neutraliser la pill-box (bunker) qui se trouvait être notre objectif.

L'importance de cette position était que les allemands commandaient leur mortier depuis ce bunker et il était très important et vital de neutraliser ce bunker. Nous avons tiré dessus è la mitrailleuse sans résultat. Nous avons dû attendre qu'ils remontent leur périscope pour le tirer è coup sûr.

Sergent H. Ayala

Notre mission était d'aller 200m sur la droite et d'établir un périmètre de sécurité. Nous n'avons pu le faire à cause de la violence du feu. Un vieux colonel m'a alors ordonné de remonter. C'est ce que nous avons fait et c'est là où nous nous sommes faits toucher. Il fallait absolument que nous neutralisions les périscopes du bunker et le sergent Mac Donnell était un expert de cela ... Il en a eu trois ! Dés que nous en touchions un, nous pouvions sentir la violence du feu décroître. Voilà. Après, c'est une longue histoire. Nous sommes allés d'ici à Isigny, puis à Carentan, St-Lô, Saint-Nazaire et beaucoup d'endroits, Valenciennes, la Belgique, la Hollande et le Luxembourg. Et finalement tout s'est terminé en Tchécoslovaquie.

Sergent Has
Ca, c'était la 2e section ...

Notre histoire est un peu différente. Nous avons débarqué sur la plage avec 9 véhicules. A ce moment là, pour conserver tout notre équipement, (vêtements etc ...) nous les mettions en pile sur le capot devant nous : un half-track, vous le savez, a le devant d'un camion et l'arrière d'un tank. Alors on n'arrivait pas è tirer droit devant nous. A ce moment là, un officier avec de grandes moustaches -je m'en souviendrai toujours, il portait des bottes de cheval qui brillaient ...- arrive en courant. Il nous désigne un point élevé sur lequel nous devions tirer. Et juste è ce moment-là, "boum", nous nous faisons aligner, les coups arrivent. J'ai pris toute ma section et on est retourné è la mer, dans la Manche. On a ouvert le feu immédiatement pour empêcher le tireur de nous descendre un par un, ce qu'il aurait pu faire très facilement. Parce que nous étions comme au champ de foire. Mon canon de 35m/m a fait mouche immédiatement sur le bunker. Une fois l'alerte passée, nous avons commencé è examiner où nous étions. Il y avait des morts et des blessés partout, c'était le chaos total. Notre LCT était le seul qui ne soit pas en feu. Il y avait peut-être 10 à 155 LCT et LST qui explosaient tous en même temps envoyant des débris et de l'essence bouillante jusque dans les dunes et les collines ont pris feu. Les mitrailleuses nous tiraient dessus, les mortiers nous bombardaient. Et nous étions un peu effrayés (rires) è vrai dire terrifiés. La terreur pure ... on venait juste d'arriver, vous comprenez ... Nous avancions dans la vallée de la mort. Sur notre gauche, il y avait un mûr qui n'existe plus aujourd'hui et qui était alors couvert de morts et de blessés, de corps démembrés. Et au loin les navires qui explosaient. Du bruit, de la fureur ... indescriptible ...

Et nous nous sommes frayés un chemin jusqu'aux dunes de sable. Et nous nous sommes arrêtés là ! Par chance, on ne nous tirait pas beaucoup dessus. Quelqu'un a fait une brèche dans le mur pour atteindre la route. De le, nous sommes montés sur la colline où nous avons pris notre première position et è commencer è respirer un peu plus facilement ... Au fait, ce que je vous décrit là, du débarquement è la colline, ceci nous a pris de 8 è 10 heures ! Et je n'ai absolument pas pris conscience du temps écoulé. On ne savait jamais quelle heure il était. Nous n'avions pas mangé, nous étions surexcités. C'était vraiment mon premier jour de bataille de la guerre.

Où avez-vous passez la première nuit ?

Sergent H Has.
Sur cette colline

Andrew :
Etes-vous allés è St-Laurent ?

Sergent H Has.
Oui, nous y sommes passés avant d'atteindre Trévières qui est tombé plus d'une semaine après.

Combien de temps entre le débarquement et l'entrée à St-Laurent ?
3 jours

Sergent H Has.
Effectivement, la confusion était totale. La plage è perte de vue était couverte de matériels et de cadavres. Beaucoup d'entre nous ont dû jeter leur équipement par dessus bord et ne conserver que leur fusil. Nos treillis étaient imprégnés d'essence et, avec notre équipement perdu, nous avons dû rester avec nos vêtements plein de sable et d'eau, j'n'sais combien de jours ... Oh ! au moins deux semaines ... et aussi, nous avons été très longtemps sans manger. Nous avons perdu à peu près 30 è 40 véhicules. On a eu un gros pépin à Carentan : les hommes du génie construisaient un pont qui, aussitôt terminé, a explosé. Ceci dura 2 ou 3 jours. Finalement l'un d'entre nous repérera une femme ou un homme dans une habitation qui lavait des vitres. Et c'était le signal pour faire sauter le pont. Finalement nous avons réalisé ce qui se passait et le problème a été réglé. Je me souviens aussi que lorsque ces gars là (il désigne les autres) tiraient sur le bunker, le sol donnait l'impression de faire des bonds. Voilé mes souvenirs principaux j'en ai sûrement oublié ...

Andrew :
A quelle étape exactement vous êtes vous sentis en sécurité ?

Sergent 0.Monson
Je ne sais pas. Ça a été très chaud pas mal de temps et on a bien cru qu'on allait rembarquer.


Sergent H. Hass
Pour répondre à votre question, il n'y en a pas eu de moments de sécurité ! Le matin suivant, lorsque la 2e division d'infanterie nous a dépassés, je me suis dit qu'on avait une chance ...


Sergent 0.Monson
Ça fait du bien de savoir qu'il y a l'infanterie devant ! C'était les gars du navire Oklahoma reconnaissable à leur emblème figurant une tête d'indien.

Paul : Avez vous perdu beaucoup d'hommes à cause du tir des navires au large ?

Sergent 0.Monson
Oui. Il y avait le Texas, l'Auguste et le Nevada qui, tous trois, pilonnaient les collines. Il les ont comme consumées ...

Sergent 0.Monson
Finalement, on a eu le drapeau nazi du bunker. Le voici. Nous l'avons conservé. Je le rapporte pour le donner au Maire de Saint-Laurent. Je l'ai gardé pendant 50 ans. Ma fille m'a demandé: "Pourquoi ne le gardes tu pas?" Je lui ai répondu : "Ça fait 50 ans que je l'ai, je crois qu'il doit retourner d'où il vient".

Nous avons grimpé la falaise et nous avons regagné une ferme. Là, mon capitaine avait un moral très bas. Il m'a dit : "Sergent, nous avons tout perdu". Nous étions dans un verger où nous avions posté des sentinelles et il y avait une grande maquette allemande représentant la plage destinée à l'entraînement. Le soir venu, j'ai dit à mon capitaine : "Je ne pourrai pas dormir ce soir, prenez mon sac de couchage. Il s'est couché sous la table supportant la maquette. A une heure du matin, on nous a tiré dessus. Nous avons riposté et atteint des vaches, des chevaux et quelques-uns de nos hommes. Il y avait un tireur d'élite allemand, reconnaissable à un galon blanc, qui était là pour tuer nos officiers.

.../... A SUIVRE
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Message  Bobabs Lun 20 Fév - 10:32

.../... SUITE ET FIN

Le jour suivant, mon capitaine m'a ordonné d'aller à Vierville. Au carrefour de Vierville, nous sommes entrés dans un champ où il y avait une pancarte "Achtung, minen". En fait il n'y avait pas de mines, mais on ne le savait pas. Quelques semaines avant, Rommel était venu en inspection et quand ses officiers l'ont su, ils ont mis des pancartes de ce type partout, absolument partout. Il y avait lé un civil français que j'ai agrippé en lui demandant où étaient les mines. Il m'a dit que tous les champs n'étaient pas minés mais il ne savait pas lesquels. Il m'a dit aussi quelque chose qu'on ne nous avait jamais dit à l'entraînement, c'est qu'il n'y avait pas de mines dans un champ où il y avait du bétail ! Cette nuit là, il nous a apporté du cognac et du calvados ...

Puis nous nous sommes installés dans Vierville. Nous progressions ensuite à travers champs. J'étais sur le capot du half-track pour repérer les mines. Les allemands avaient un guetteur dans Vierville et ils nous ont encadrés avec leur artillerie. Mon half-track a reçu un coup et a commencé à brûler. Nous sommes alors allés è pied de Vierville à St-Laurent en passant par la plage jonchée de cadavres. Le capitaine me demanda ce que je faisais ici. Je lui racontais ce qui s'était passé. Et j'ai dû rester 10 è 12 jours sans véhicule.

Alors, je suis resté quelque temps en France et pour finir en Tchécoslovaquie où j'étais chargé de l'approvisionnement des prisonniers allemands. Entre temps, nous avons été à Bastogne, au Luxembourg. Et la période la plus longue où nous soyons restés au même endroit a été de 20 jours. Mon capitaine a été tué le 21 décembre 44 par des éclats dans le dos. Puis j'ai été envoyé en Tchécoslovaquie pour travailler avec la 88e division.

Brièvement, Messieurs, où avez vous terminé la guerre ?

Sergent D Estes
Prés de Pilsen en Tchécoslovaquie. Nous avons laissé l'endroit aux Russes.

Sergent T Macdonnell
Je voudrais un peu revenir en arrière ... car pour moi ça a été différent des autres. J'ai été touché deux fois assez sérieusement pour devoir retourner en Angleterre avec le premier chargement de blessés. Je suis resté à peu prés trois mois et j'ai subi trois opérations. Une fois sur pied, une lettre de réquisition réclamant mon retour au 467e m'a été envoyée. Le capitaine Napier è qui la réponse a été adressée ayant été tué è St-Lô dans l'intervalle, la lettre n'a pas eu de suite et de ce fait j'ai été attaché à une unité aérienne puis è la 2e division cuirassée (armour?). La 467e est partie en Hollande et j'ai essayé de les retrouver la-bas. J'ai réussi è retrouver le PC mais il m'ont renvoyé è une autre unité. Puis j'ai été blessé è nouveau à St-Vie (?) en janvier 45 et j'ai passé le un mois è l'hôpital. Puis j'ai été réquisitionné par le 467e où je suis resté jusqu'à la fin de la guerre pour faire du renseignement. J'ai terminé à Leipzig et à Pilsen et suis rentré aux Etats-Unis en Novembre 45.

Sergent D Estes
Moi aussi, je suis rentré en novembre, depuis Munich.

Sergent H. Ayala
Le 467e faisait partie de la fameuse "course" de Patton (thé run) : 100 miles de Luxembourg è Bastogne. Nous dormions par terre et la neige était glaciale (rires). Quelques uns ont eu des engelures.

Juste 2 questions s'il vous plaît ...

1/ Qu'avez vous fait après la guerre ?

Sergent Macdonnell
Je suis devenu obstétricien. Pendant la guerre, j'ai tué tout ce que je pouvais et maintenant je voulais sauver des vies au lieu d'en prendre ... J'ai fait naître à peu près 4500 bébés ... (rires) et maintenant je fais partie de la chambre des représentants du Missouri, (applaudissements)


Sergent H. Ayala
Je me suis installé à 30 miles au nord de San Francisco. Et j'ai travaillé aux installions de sous-marins nucléaires


Sergent 0.Monson
J'ai travaillé pour une compagnie aérienne privée et je me suis balladé un peu partout dans le monde pendant 38 ans (applaudissements)

Sergent D Estes
Mon père a fait la 1ère guerre mondiale et il s'est engagé comme volontaire dans le Pacifique à 47 ans. Et mon fils est allé au Vietnam. Avant d'aller à la guerre à 25 ans, je travaillais dans une boucherie. J'ai participé aux Jeux Olympiques de Munich après la guerre et de retour, j'ai perdu ma femme après huit mois. J'ai été représentant de commerce pendant 40 ans. Je me suis remarié et j'ai eu 6 enfants. J'ai pris ma retraite et j'ai élevé du bétail pendant 2 ans. J'ai fait faillite et j'ai recommencé à travailler comme inspecteur de camions de propane. Puis j'ai travaillé 4 ans dans une station de radio. Et maintenant, je suis animateur dans un super-marché ... je fais rire tout le monde avec mes blagues salaces ... !

Sergent H Has.
Je suis rentré à la Poste et je viens de prendre ma retraite.

Sergent H.Ayala
Les Ayala ont toujours fait la guerre ... Tom, mon fils, était au Vietnam où il a été blessé 4 fois. C'est tout ce que je voulais dire.

2/Cette interview est destinée aux enfants de France, aux jeunes générations ... Qu'avez vous à leur dire 50 ans après ?

Sergent H Has.
J'espère qu'il ne leur arrivera pas ce qui nous est arrivé ... La meilleure chose à faire, c'est de rester modéré et de ne pas écouter les extrémistes.


Sergent H. Ayala
En 45, on croyait que c'était fini ... En fait, après il y a eu le Vietnam et le monde d'aujourd'hui n'est que conflits. Mon message aux enfants est, comme je l'ai dit avant : apprenez, ayez du savoir, étudiez l'histoire et la philosophie et méfiez vous des démagogues qui veulent la guerre.

Sergent D Estes
Je parle devant des classes, dans des lycées. La semaine dernière, j'ai parlé à 180 lycéens dans Illinois. On doit leur parler à ces enfants. On est là assis comme de vieux crabes, on doit se lever et leur dire ce qui s'est passé. La classe è laquelle j'ai parlé dernièrement était à 97% composée de mexicains et de noirs. Et ces enfants doivent savoir que des gens sont morts pour eux et qu'ils ont de la chance d'être assis là. (...) J'ai reçu 70 lettres de remerciements de ces enfants. C'était bon (I felt good) et je veux remercier tout ce que les Français ont fait pour nous. Allez à l'école et n'arrêtez au milieu. C'est important de faire des études dans le monde, aujourd'hui.


Sergent H. Ayola
Toutes les races ont combattu pour la liberté dans l'Armée américaine. Nous sommes tous des émigrants de divers pays ...

Paul : A la libération, avez vous été submergés par des jolies filles comme on le voit dans les archives d'époque ?

Sergent Has
Oui. Et pas qu'en France ... ! En Hollande, au Luxembourg, en Autriche, en Tchécoslovaquie ... Je n'ai jamais eu autant de veine ! (rires)

Sergent Ayala
Je joue de la guitare et quand j'en avais le temps, je jouais et j'attirais beaucoup de monde, et pas seulement des filles.

Sergent Monson
Laissez moi vous raconter une histoire et je m'arrêterai là. Quelque part en France, nous avons trouvé un petit chien ... On l'a pris avec nous. On l'appelait "petite". C'est une histoire vraie ... Il nous a accompagné en France, en Belgique et on est arrivé en Allemagne. Le chien - c'est un peu triste mais je vous le raconte quand même- avait une infection dans la queue; on lui a coupé, on a mis de la pommade et il a guéri. Un jour, on s'est arrêté au bord de l'autoroute, il était avec nous depuis 2 à 3 mois, il a disparu, on l'a cherché en vain et nous avons dû partir. Nous étions tous au bord des larmes .. Nous avions perdu notre mascotte.

Sergent Macdonnell
Ce que nous devons dire à nos enfants : apprenez l'histoire, ayez de l'amour dans votre cœur et dans vos actions, et ne vous engagez jamais dans la guerre si vous pouvez l'éviter par voie diplomatique ou dans des négociations honnêtes. Ayez de la compréhension pour les autres et travaillez au bien-être des générations futures. Prenons conscience que nous sommes dans la main de Dieu et comportons nous entre nous comme Dieu le fait avec nous. Merci. (Applaudissements)


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Merci à Monsieur et Madame Bertrand de m'avoir remis ce témoignage
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Message  Bobabs Lun 20 Fév - 10:33

Témoignages du vétérants Georges S. Morris

Georges S. Morris Insigne de la 29éme dpch

Lorsque le private Georges S. Morris, de la 29ème "Blue and Grey" débarque à Utah Beach le 6 juin 1944 en fin de soirée, la plage porte les traces d'un drame. Ce que découvrent les soldats du 175è R.I US leur donne un aperçu des épreuves qui les attendent dans leurs combats pour la libération de l'Europe.

"Je faisais partie du 175ème Infanterie, 29ème division "Blue and Grey". Le 6 juin 1944 en fin d'après-midiLa plage était enfin sécurisée. Lorsque nous avons débarqué, le LST ne pouvait pas atteindre la plage. Nous avons dû marcher dans l'eau sur une assez grande distance. J'avais de la chance de ne pas être parmi les premiers qui avait combattu et pris la plage, car quand nous y sommes arrivés, il y avait des corps partout sur le sable. Il nous était impossible de marcher sans toucher le corps d'un Américain ou un Allemand. Personne ne pleurait, personne ne criait "Au secours." Ils étaient tous morts. Je rédige tout ceci 50 ans plus tard, et même si je ne veux pas mettre par écrit ce qui se passait, je dois expliquer les évènements miraculeux dont je me souviens pendant cette guerre en Europe.
Il y a pourtant beaucoup de détails dont je ne me souviens pas : les batailles, les villes par où nous sommes passés. La 29ème Division s'était entraînée en Angleterre avant notre débarquement en France. J'étais convaincu que la plupart de nos soldats seraient tués là-bas. J'étais mitrailleur, et on m'avait déjà dit que l'espérance de vie d'un mitrailleur ne dépassait pas trois minutes. Je réalisais à quel point mes chances de m'en sortir sain et sauf étaient minces.

Après avoir parcouru quelques mètres de la plage, notre Sergent nous a dit de jeter tout de suite tout ce dont nous n'avions pas absolument besoin. Je ne sais pas exactement ce que j'ai jeté, des cigarettes, probablement... Je pensais plutôt à un moyen de survivre à cette longue guerre qui nous attendait. Je savais qu'il y a une puissance plus forte que n'importe quelle armée du monde, et que celle-ci était Dieu. Alors j'ai prié et j'ai demandé à notre Seigneur de m'épargner et d'assurer que j'en sorte sain et sauf. Et Il l'a fait, pour moi tout au moins.

Il faisait nuit quand nous avons quitté les lieux. Le silence régnait partout. On avait repoussé les Allemands. Je me demandais ce qui arriverait après le coucher du soleil. Nous avons avancé très lentement et nous nous sommes souvent arrêtés. Tout le monde avait peur. Je n'oublierai jamais notre premier Sergent ; il était notre leader. Il était soldat depuis longtemps, et il était dur, jusqu'à cette nuit-là. Il a pleuré comme un bébé et je me suis apitoyé sur son sort. Je ne me souviens pas du tout de ce qui lui est arrivé après.


Je veux passer au 12 juin et mettre les six pires jours de la guerre derrière moi. Nous traversions un champ près d'une rivière. C'était un champ de blé, je crois. Quand on l'avait cultivé, une petite strie restait au milieu créeant une toute petite tranchée. Une mitrailleuse ennemie venant de l'autre côté avait ouvert le feu sur nous, et nous nous trouvions cloués au sol. J'ai sauté dans la petite tranchée entre les plantes et j'y suis resté étendu face contre terre. Je sentais l'air siffler à cause des balles, et j'ai commencé à creuser une tranchée plus profonde pour m'y mettre. Alors, j'ai creusé avec mes mains , et j'ai finalement avancé dans cette tranchée. Enfin, quelqu'un a entouré la mitrailleuse, et l'a démolie. Un peu plus tard, nous avons traversé une petite rivière dont je ne me rappelle pas le nom. Elle était peu profonde, un mètre tout au plus, mais la rive était bien glissante et raide. Les autres l'avaient déjà traversée. Lorsque j'ai atteint l'autre côté, il y eut des détonations de mitrailleuses. Je portais moi aussi une mitrailleuse et j'ai essayé de sortir deux fois de ce fossé, mais j'ai systématiquement glissé en arrière. La troisième fois, mon Sergent a attrapé le canon et m'a aidé à surmonter la pente. Nous avons parcouru un champ et sommes entrés dans le bois. Il faisait très tard, donc nous y sommes restés toute la nuit. Le reste de la nuit fut calme. Plus tard, dans la pénombre, je me suis allongé sur le sol pour me reposer et y faire une petite sieste. J'avais froid, j'étais trempé, mais je me suis endormi. Plus tard, je me suis réveillé avec une sensation brûlante à la jambe gauche. J'ai retiré mon pantalon et j'ai découvert qu'une balle m'avait atteint. J'ai marché jusqu'à l'endroit où se trouvait la trousse de première urgence. Les infirmiers ont nettoyé la blessure et m'ont demandé si je voulais aller à l'hôpital, mais je leur ai dit que ça n'en valait pas la peine. J'ignorais où je me trouvais quand la balle m'avait atteint, c'était probablement quand nous étions dans le champ de blé. Je n'avais rien senti. J'étais crevé d'avoir marché le plus vite que possible dans l'eau. Le jour suivant, on m'a dit d'aller au poste de commandement où le Capitaine m'a décerné le "Purple Heart". Par miracle, personne n'avait été tué en traversant la rivière. Je remercie le bon Dieu pour tout cela.

Au mois de juillet, Il faisait beau et parfois très chaud pendant la journée en Normandie. Il ne fallait que très peu de temps pour que nos vêtements se sèchent après avoir traversé une rivière ou après la pluie. Les champs étaient entourés de haies; il était presque impossible de les pénétrer. Nous ignorions ce qui se trouvait derrière elles. Je me souviens d'un endroit dans un plus grand champ. Je restais debout et juste à droite, à quelques centaines de mètres, il y avait une grande grange entourée d'arbres. J'entendais le feu de chars d'assaut. En ce moment-là, je ne savais pas quoiou qui ils visaient. Quelques minutes plus tard, mon Sergent a dit que deux chars tiraient sur un troisième qu'ils avaient identifié pour un char allemand. Pourtant ce blindé était des nôtres, la radio ne marchait pas et ils étaient restés muets aux appels. Les deux Sherman ont ouvert le feu et l'ont fait exploser en petits morceaux. Il a brûlé longtemps. Il était triste que ces hommes furent tués par les leurs. Au même endroit, quelque chose de pire s'est passée. C'était peu de temps après, j'ai entendu notre artillerie ouvrir le feu à une distance derrière nous. J'ai entendu venir les obus vers nous. Je pensais qu'ils allaient nous dépasser en haut en visant les Allemands comme ce fut le cas tant de fois avant. Le déluge d'obus est arrivé directement sur nous et il n'y avait aucun endroit sûrr. Je pensais qu'ils n'arrêteraient jamais. Un soldat restait à cinq mètres de moi. Un obus l'a atteint directement et il a été déchiqueté. Je restais debout comme si j'avais du blindage autour de moi, et je n'ai reçu aucun éclat d'obus. J'étais très très chanceux.

Mon sergent, Frank Chaddish, était un de mes meilleurs amis. Lui et moi, avons parcouru le champ à la recherche de survivants. Ils étaient tous morts. Plusieurs faisaient partie d'une autre division. Il me semblait que personne n'a eu le temps de se protéger. Nous avions besoin de l'un l'autre, et tous étaient de bons soldats. Il était assez pénible d'être tué par l'ennemi, mais il était insupportable d'être tué par les siens. C'était une triste erreur et je ne savais pas à qui appartenait la faute. L'Artillerie faisait partie de notre battaillon. Quand nous avions avancé vers le front, quelqu'un devait appeler à l'artillerie pour les avertir. Il est possible que notre capitaine ne le fît pas. Je ne sais pas à qui incombe l'erreur. J'espère que le Seigneur a retenu une place pour tous les soldats tués en cet endroit et pour tous les autres soldats tués dans cette guerre.

Personne n'aimait se battre , mais il le fallait pour sauver ce monde où nous vivons en paix aujourd'hui. Je souhaite relater une anedocte, celle de ma bible, dont chacun d'entre nous a reçu un exemplaire avant notre départ de l'Angleterre. Le Président Roosevelt avait voulu que chaque soldait en eut un. J'ai gardé le mien dans la poche de ma chemise. Un jour, je l'ai sorti et j'ai remarqué un petit trou sur la couverture. il avait atteint la 64ème.... Mon livre avait empêché un morceau d'obus d'entrer dans ma poitrine. Ce fut l'un des miracles dont je parle. Partout où j'allais, j'ai gardé cette petite Bible avec moi. Je l'ai lue et relue et je l'ai toujours en ma possession aujourd'hui.

Je me souviens d'un autre miracle. Nous faisions la route sur une petite ruelle de campagne. Il y avait des chars pour nous accompagner. Je marchais derrière l'un d'eux. Un mètre devant moi, le char a percuté une mine ; il y eut une énorme explosion et la chenille s'est sectionnée juste devant moi. Encore une fois, j'étais indemne. Personne ne fut touché par cette explosion à ce que je sais. Nos chars nous aidaient beaucoup et jouaient un grand rôle dans la guerre, mais je n'ai plus voulu rester près d'eux après cet incident.

Je veux maintenant raconter quelques souvenirs concernant ma seconde blessure, près de St. Lô, le 15 juillet 1944. C'était un samedi, très tard, vers le coucher du soleil. J'avais déjà fait un trou individuel pour ma protection. Tout était tranquille, nous restions debout en parlant quand j'ai entendu de l'artillerie allemande ouvrir le feu par deux ou trois fois. Je savais que, si le feu venait vers nous, il serait là dans quelques secondes. Il ne me restait que quelques mètres pour arriver à ma tranchée, mais je n'en ai pas eu le temps pour y arriver, donc je me suis allongé par terre. Les obus explosaient juste avant de toucher le sol. Un éclat m'est entré dans le dos. Je sentais couler le sang de mon flanc. Je me suis levé et j'ai dit au Sergent que j'avais été blessé. Il a marché avec moi vers et m'a ordonné d'aller au poste de secours. J'ai marché aussi vite que possible. Il faisait nuit quand j'y suis arrivé. Les infirmiers ont pansé ma blessure et m'ont donné un calmant. J'y suis resté un certain temps. Je suis monté sur un véhicule avec d'autres blessés et nous sommes retirés vers un hôpital mobile et y sommes restés la nuit entière . Le lendemain, je suis mis dans un avion et on nous a envoyés en Angleterre. Je n'oublierai jamais comment j'étais malade en traversant la Manche en avion. Je regardais en bas vers les navires et l'eau. Je ne me rends pas compte de la durée du vol - une heure, peut-être moins. J'étais content d'arriver à un vrai hôpital et de dormir paisiblement dans un lit propre loin de la guerre. Une semaine plus tard, le médecin est entré pour regarder ma blessure. Il m'a dit qu'il devait enlever la projectile. Je ne sais pas pourquoi il avait tant attendu. Il ne m'a rien donné de calmant. Il l'a enlevée tout simplement avec des pincettes, à vif . La chair avait déjà commencé à pousser autour du projectile. Je pensais que j'allais m'évanouir à cause de la douleur. .Pendant mon séjour à l'hôpital, j'ai pu me reposer malgré ces souffrances et j'ai donné un litre de sang pour mes camarades.

J'ai retraversé la Manche vers la France avec d'autres soldats. Nous l'avons ensuiite parcourue en camions. En approchant de Paris, il y avait beaucoup de personnes nous faisant signe de la main. Nous avons continué notre route en Belgique et en Hollande. Nous sommes passés par des villes entièrement détruites. Je ne savais pas si je rejoindrais ma division. Quand nous sommes enfin arrivés à notre destination, peu d'anciens camarades restaient. Il y avait beaucoup de nouveaux venus. Ceci nous menait à la fin du mois d'octobre 1944 et il faisait frais. Pendant ce temps, nous étions en Belgique, près de la frontière allemande. Nous y sommes restés quelques jours. Ma compagnie pouvait se reposer. Je n'étais pas du tout content d'être de retour sur le front. Je supposais que je devrais faire, une fois de plus, de mon mieux et faire confiance en Dieu....

Au début de novembre, après avoir franchi la frontière allemande, nous marchions sur une route près d'une petite ville déjé prise par notre Division. Quand nous sommes entrés dans la ville, j'ai entendu survoler des avions. C'étaient des Allemands. Ils volaient et se préparaient à plonger et ouvrir le feu avec leurs mitrailleuses. Je suis resté accroché devant une porte et les ai regardés. Il y en avait quatre ou cinq. Ils n'ont pas eu le temps d'ouvrir le feu sur nous. Nos propres avions sont arrivés juste à temps et la bataille s'est engagée. Je suis resté devant la porte et j'ai vu presque tout. Plusieurs obus et des morceaux d'avions sont tombés dans la rue près de moi, sans que je ne sois atteint. Un autre miracle dont j'ai remercié Dieu à maintes reprises. Tous les avions allemands étaient abattus. Nous sommes restés quatre jours à Bourheim. Il avait beaucoup plu et nous y avons passé la "Thanksgiving" (la fête américaine de l'action de grâce) dans cette ville. Quelqu'un a eu une nouvelle inattendue : nous devions avoir un vrai dîner chaud. Je ne pouvais pas le croire. Il pleuvait à torrents et nos soldats étaient partout dans la ville, les Allemands essayaient de la reprendre. Nous avons eu notre grand dîner ce soir-là. En cet endroit, il y avait une grande meule de foin et dedans, un trou où les vaches avaient mangé. Nous sommes entrés dans la meule et nous avons mangé notre dîner de dindon avec toutes les garnitures. Ceci était le premier repas chaud depuis longtemps. Il aurait été merveilleux de pouvoir y rester pour la nuit. C'était sec et frais dedans. Mais nous avons dû nous déplacer quelques mètres de loin pour monter nos mitrailleuses et surveiller la route menant en ville. Il ne nous fallait pas creuser de tranchées, car il y en avait de plus d'un mètre de profondeur à cet endroit.

J'étais chargé des mitrailleuses. Il y aurait dû dix soldats pour les deux mitrailleuses. Il ne m'en restait que quatre hommes. J'en ai placé trois à l'autre côté de la route. Donc, me voilà avec un autre homme. Il est resté avec moi pour prendre service de la seconde mitrailleuse. Quelque temps plus tard, au cours de la nuit la pluie s'est arrêtée. Nous pouvions enfin mieux voir. Plus tard, j'ai regardé vers l'autre côté et j'ai vu les trois autres debout. Je n'ai pas compris pourquoi ils n'étaient pas restés dans les tranchées. Il m'a fallu quelques secondes pour comprendre que les Allemands les tenaient prisonniers.... Tout ce que je pouvais faire, c'était de les regarder .... Je ne sais pas pourquoi ils ont permis les Allemands de les approcher. Il n'y avait pas de danger. Dès lors nous n'étions plus que deux pour tenir la route et ce champ. Mon camarade me déclara quelque chose bougeait en face de nous. J'ai répondu que ce n'était que des vaches, mais quelques secondes plus tard, j'ai pensé que c'étaient peut-être des Allemands. Mon copain a commencé a tirer le plus vite possible. Au moins mille balles ont été tirées. Puis, la mitrailleuse s'est enrayée et on ne pouvait plus tirer. Nous avons dû les impressionner, parce que le reste de la nuit fut tranquille.

.../... ASUIVRE
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Message  Bobabs Lun 20 Fév - 10:33

.../... SUITE ET FIN

Témoignages du vétérants Georges S. Morris



Toutes les compagnies manquaient d'hommes. Nous avons poursuivi notre progression et quelques jours plus tard, nous sommes arrivés à un poste de repos et y sommes restés plusieurs jours. J'ai fait l'école de sous-officier de la 29ème Division d'Infanterie du 3 au 8 décembre 1944 avant de regagner mon unité. Nous traversions les champs et près de nous se trouvaient des chars dont beaucoup flambaient encore... Un de mes camarades a pris une balle dans la jambe ; le sang coulait abondamment. Il n'y avait personne pour l' aider, donc j'ai mis un garrot au-dessus de sa blessure pour arrêter le flot de sang. Cela a un peu aidé. Je ne savais pas quoi faire, alors j'ai prié. J'ai demandé à Dieu de faire arrêter ces canons . Et aussi curieux que cela puisse paraitre, c'est ce qui s'est passé . Il y avait deux chars tout proches, et j'ai couru aussi vite que possible vers eux. Un des membres d"équipage était debout tout en restant dans la tourelle. Je lui ai expliqué que j'avais besoin de son aide pour transporter le blessé au poste de secours, à quelques centaines de mètres de là. Le poste de secours se trouvait dans un petit village. Nous y avons placé le soldat sur le char et on l'a amené au poste. J'ai marché et j'y suis arrivé pratiquement au même moment. Je suis entré pour demander du secours . Grâce à cela, mon camarade s'en est sorti.
Il était tard, alors je suis resté au poste de secours un moment. Mon groupe s'était déplacé vers le champ en face de ma position originale. Je n'avais aucune chance de les retrouver dans le noir. Beaucoup plus tard, le Capitaine est revenu pour le ravitaillement. Nous sommes rentrés dans un petit village où le groupe était rassemblé. A notre arrivée, le Sergent a dit qu'un mitrailleur avait ouvert le feu sur un char allemand. Le char avait répondu de même, tuant le soldat. Si je n'avais pas aidé le premier blessé, j'aurais probablement été avec lui et j'aurais été tué.

Fin décembre 1944, le temps devenait froid, avec de la neige et la grêle. Je me souviens de la veille de Noël, nous avions reçu quelques bonbons, des biscuits, et quelques autres aliments. Nous nous trouvions aux environs d'un petit bourg à quelques kilomètres de Bastogne. Notre mission était de surveiller le village et la rivière. Nous y sommes entrés puis nous nous sommes régalés de nos petits cadeaux. C'était un endroit très tranquille, à part quelques obus qui sont tombés près du bâtiment où nous mangions. Plus tard nous sommes sortis pour établir un avant-poste devant le village. Deux soldats m'ont accompagné; nous nous approchions d'une voie de chemin de fer érigée sur un digue. Nous sommes venus à un endroit où il y avait un trou sous la voie, en face d'une petite rivière. Nous avons mis un fil au-dessus de la neige pour notre téléphone. J'appelais en cas de quoique ce soit, entendu ou vu. La nuit était claire, la lune brillait dans le ciel et se reflétait sur la neige. Tout était tranquille, mais au loin on pouvait entendre une une musique bizarre. Il nous était impossible de nous endormir. Il faisait trop froid. La nuit passa lentement. Le jour suivant, on nous a envoyé la relève et nous sommes retournés au village. Ce jour de Noël était très silencieux et même plus froid que la veille. Nous sommes restés encore quelques jours.


La Bataille de Bastogne avait commencé le 16 décembre et durait un mois entier. C'était là-bas que mon frère, L.B. Morris, a été fait prisonnier et envoyé vers un camp . Il m'a dit plus tard qu'ils étaient t 2300 soldats et qu'il avait fallu entamer une marche très pénible pour arriver au camp. Peu d'entre eux y sont arrivés, peut-être 400 à 500, les autres étaient morts de froid, d'épuisement ou avaient été abattus. Si un prisonnier se plaignait , ou s'il était trop fatigué soit les Allemands le fusillaient, soit ils le laissaient mourir dans le froid. Les pieds de mon frère s'étaient gêlés . Il m'a raconté le traitement qui leur avait été infligé dans ce camp.Tout le monde souffrait de malnutrition Il m'a décrit une soupe que l'on avait donné à manger. Il l'a comparé à une soupe d'herbe, parce que cela ressemblait à un mélange d'herbe et d'eau bouillie. Des fois, ils reçevaient des colis de la Croix Rouge américaine, mais c'était rare. Je suppose que les Allemands crèvaient de faim aussi ailleurs. Après 5 mois dans cette prison, l'Armée anglaise les a libérés. C'était vers la fin de la guerre. Mon frère a rencontré de gros problèmes avec ses pieds tout le reste de sa vie.
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Je veux raconter l'histoire d'un de mes plus grands amis. Il avait été dans la guerre depuis 5 mois. Il est arrivé à un certain point où il n'en pouvait plus. Sa morale était au plus bas. Il m'a dit que ce soir-là, juste avant le crépuscule, nous ne nous réscaperions de la guerre. Il m'a dit qu'une chose nous restait - une seule chance. Il ne voulait pas s'enfuir de tout le mal dont nous faisions face, et il ne pensait pas à se réfugier dans un trou ni dans une grotte. Je ne comprenais pas et j'ai demandé une explication. Il m'a demandé de tirer sur lui, dans la jambe, et il ferait de même pour moi. Nous nous serions ainsi dans un hôpital loin de cet enfer. J'ai répondu que j'étais incapable de le faire. Je mettrais ma confiance en Dieu pour me sauver pendant les jours finaux de la guerre. J'a lu des vers de mon petit Testament, et je lui ai r aconté ce que j'avais vécu le 6 juin. Je savais que le bon Dieu m'avait épargné sur la plage le 6 juin et qu'Il l'épargnerait aussi. Le matin venu, nous avons quitté l'endroit et parcourions un champ. Mon ami me suivait à une distance. Tout d'un coup, j'ai entendu une énorme explosion. Il avait marché sur une mine et elle a éclaté. Je me suis retourné, visant de retrouver sa plaque d'identité, mais il ne restait rien de lui. C'était un miracle que je n'ai pas marché sur la mine au lieu de lui. C'aurait été moi aussi qui avait trouvé la mort. Il était un très bon soldat et il a servi avec distinction. Je lui ai beaucoup réfléchi depuis. Je n'ai pas de mépris pour son plan. J'avais beaucoup d'amis qui ont trouvé la mort pendant cette guerre. Quelques-uns depuis notre entraînement. Ils étaient tous d'excellents soldats. Je me souviens de deux camarades qui sont devenus fous, qui on t couru directement vers le front allemand. J'ai essayé de les convaincre de retourner vers nous, mais j'ignore ce qui leur est arrivé. Peut-être ils se sont fait prisonniers.
Je ne veux plus raconter le mal de cette grande guerre qui durait depuis des mois. Nous avons traversé le Rhône et sa vallée et nous sommes dépassés beaucoup de grandes villes entièrement détruites. Je me souviens que nous marchions tout près de grandes bombes restées intactes, jamais d'être explosées. Nous sommes dépassés des bois où restaient encore d'immenses arbres, semblant abattus par des éclairs. Je veux maintenant raconter le bon dans ma mémoire. La guerre avait presque touché à sa fin, et l'hiver était terminé. Le printemps s'annonçait chaud et beau. Nous traversions des collines et des vallées. La terre était très arable, très bien pour l'élevage de vaches. Nous sommes arrivés à une maison entourée d'autres granges. La ferme était en très bon état. Nous nous sommes arrêtés et un vieil Allemand est sorti. Quelques secondes plus tard, une jeune fille est aussi sortie.&nb sp; Elle avait peut-être 12 ans. C'était sa petite-fille. Nous y avons passé deux ou trois jours. Ils nous ont très bien traités, et nous sommes entrés plusieurs fois pour entendre la jeune fille jouer du piano et chanter. Ils n'ont jamais expliqué ce qui s'était passé aux autres de la famille. Je suis certain que beaucoup de bons Allemands n'étaient pas d'accord avec ce que Hitler et les autres leaders avaient voulu dans cette longue guerre qui provoquait la mort de tant de personnes. Quand nous en sommes partis, on nous réorganisait et nous étions remis dans plusieurs grandes forêts aux environs de la ville de Klotze. Le 22 avril, nous avons parcouru la forêt pour déterminer s'il n'y avait pas d'Allemands en cachette. Toute la 175ème Infanterie participait, chaque homme trois mètres de l'autre, en fouillant dans le bois. Il me semblait qu'il y avait beaucoup de faune que d'hommes. Il y restait beaucoup de cerfs.

Le 25 avril 1945, tous les trois battaillons se sont rassemblés dans une clairière de la forêt Krisebeck. Le 26, nous nous sommes disposés aux bords de l'Elbe et nous avons attendu l'arrivée de l'Armée soviétique. On mettait quelques jours avant son arrivée. En face de nous, beaucoup d'Allemands désireux de nous rejoindre de notre côté restaient. Ils n'ont pas voulu se faire prisonniers par l'Armée soviétique. Plusieurs ont essayé de nager à travers le fleuve, mais ils n'ont pas pu survivre longtemps dans les courants difficiles et froides. Nos ingénieurs ont érigé un pont à pontons et beaucoup d'eux nous avons rejoints. C'était formidablement heureux de savoir que la guerre serait bientôt terminée. C'était bien de voir et de rencontrer les soldats russes. Enfin, nous avons quitté cet endroit et nous nous sommes beaucoup dispersés.

Le premier août, j'ai reçu deux semaines de permission et je suis allé sur la Côte d'Azur. Je me suis bien amusé sur les plages ensoleillées. Pendant mon séjour, la guerre au Japon avait fini. Je me reconnaissais qu'avant longtemps, je serais de retour aux Etats-Unis. Je me souviens que, en tant que petit garçon, je lisais des récits de la Guerre de Sécession et de la Grande Guerre de 1914-1918. Je n'avais jamais pensé qu'un jour, je me trouverais dans une aussi terrible guerre. Je peux encore raconter de mes exploits dans la guerre, mais c'est l'heure de finir. Ça fait tellement long depuis. Je remercie encore le bon Dieu pour ma survie. Le plus important, c'est qu'Il m'a épargné et m'a permis de vivre cinquante ans de plus.

George S. Morris
le 2 novembre 1994
Bobabs
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General of the Army
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